Page:Du halde description de la chine volume 2.djvu/201

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mort doivent être examinés, décidés, et souscrits par l’empereur. Les mandarins envoient en cour l’instruction du procès, et leur décision, marquant l’article de la loi qui les a déterminés à prononcer de la sorte : par exemple, un tel est coupable de crime : la loi porte qu’on étranglera ceux qui en sont convaincus ; ainsi je condamne un tel à être étranglé.

Ces informations étant arrivées à la cour, le tribunal supérieur des affaires criminelles examine le fait, ses circonstances, et la décision ; si le fait n’est pas clairement exposé, ou que le tribunal ait besoin de nouvelles informations il présente un mémorial à l’empereur, qui contient l’exposé du crime et la décision du mandarin inférieur, et il ajoute : pour juger sainement, il paraît qu’il faut être instruit de telle circonstance ; ainsi nous opinons à renvoyer l’affaire à tel mandarin, afin qu’il nous donne les éclaircissements que nous souhaitons.

L’empereur ordonne ce qu’il lui plaît, mais sa clémence le porte toujours à renvoyer l’affaire, afin que quand il s’agit de la vie d’un homme, on ne décide point légèrement, et sans avoir les preuves les plus convaincantes. Lorsque le tribunal supérieur a reçu les informations qu’il demandait, il présente de nouveau la délibération à l’empereur.

Alors l’empereur souscrit à la délibération du tribunal, ou bien il diminue la rigueur du châtiment ; quelquefois même il renvoie le mémorial en écrivant ces paroles de sa main : « Que le tribunal délibère encore sur cette affaire, et me fasse son rapport. » On apporte à la Chine l’attention la plus scrupuleuse, quand il s’agit de condamner un homme à la mort.

L’empereur régnant ordonna en 1725 que dans la suite on ne punirait personne du supplice de mort, que son procès ne lui fût présenté trois fois. Conformément à cet ordre, le tribunal des crimes tint la conduite suivante. Quelque temps avant le jour déterminé, il fit transcrire dans un livre toutes les informations, qui pendant le cours de l’année lui avaient été envoyées des justices subalternes : on y joignit le jugement que chaque justice avait porté, et celui du tribunal de la cour.

Ce tribunal s’assembla ensuite pour lire, revoir, corriger, ajouter, retrancher, ce qu’il jugerait à propos. Après quoi il en fit tirer deux copies au net ; l’une qu’il présenta à l’empereur, afin que ce prince pût la lire et l’examiner en particulier ; l’autre qu’il garda pour la lire en présence de tous les principaux officiers des tribunaux souverains, et la réformer selon leurs avis.

Ainsi à la Chine on accorde à l’homme le plus vil et le plus misérable, ce qui ne s’accorde en Europe comme un grand privilège, qu’aux personnes les plus distinguées, c’est-à-dire, le droit de n’être jugé et condamné que par toutes les chambres du Parlement assemblées en corps.

Cette seconde copie ayant été examinée et corrigée, on la présenta à l’empereur, puis l’on en tira quatre-vingt dix-huit copies en langue tartare, et quatre-vingt dix-sept en langue chinoise. Toutes ces copies se remirent