Page:Du halde description de la chine volume 2.djvu/246

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tantôt sur le mât, et tantôt y étant seulement attachée par les chapelets. Les vergues y servaient de ralingue par le haut ; un gros rouleau de bois égal en grosseur à la vergue, faisait le même office par le bas. Ce rouleau servait à tenir la voile tendue ; et afin qu’il ne la déchirât pas, il était soutenu en deux endroits par deux ais, qui étaient suspendus chacun par deux amarres, lesquels descendaient du haut du mât à cet effet. Chacune de ces voiles n’avait qu’une écoute, un couet, et, ce que les Portugais nomment aragnée, qui est une longue suite de petites manœuvres qui prennent le bord de la voile depuis le haut jusqu’au bas, à un ou deux pieds de distance les unes des autres, et dont toutes les extrémités s’amarraient sur l’écoute, où elles faisaient un gros nœud.

Ces sortes de voiles se plient et se déplient comme des paravents. Quand on voulait hisser la grande voile, on se servait de deux virevaux et de trois drisses, qui passaient sur trois rouets de poulies enchâssées dans la tête du grand mât. Quand il était question de l’amener, ils y enfonçaient deux crocs de fer, et après avoir largué les drisses, ils en serraient les différents pans à diverses reprises, en halant avec force sur les crocs.

Ces manœuvres sont rudes, et emportent beaucoup de temps. Aussi les Chinois pour s’en épargner la peine, laissaient battre leur voile durant le calme. Il est aisé de voir que le poids énorme de cette voile, joint à celui du vent qui agissait sur le mât, comme sur un levier, eût dû faire plonger dans la mer toute la proue, si les Chinois n’avaient prévenu dans l’arrimage cet inconvénient en chargeant beaucoup plus l’arrière que l’avant, pour contrebalancer la force du vent. De là vient que quand on était à l’ancre, la proue était toute hors de l’eau, tandis que la poupe y paraissait fort enfoncée. Ils tirent cet avantage de la grandeur de cette voile, et de la situation sur l’avant, qu’ils font un grand chemin de vent arrière, et peuvent, si on veut les en croire, le disputer à nos meilleurs voiliers et même les laisser de l’arrière : mais en échange, de vent largue et de bouline ils ne peuvent tenir et ne font que dériver ; sans parler du danger où ils sont de virer, quand ils se laissent surprendre d’un coup de vent.

Dans le beau temps on portait outre cela une civadière, un hunier, un grand coutelas qui se mettait au côté de la voile laquelle était sans écoute, des bonnettes, et une voile carrée à l’artimon. Toutes ces voiles étaient de toiles de coton.

La poupe était fendue par le milieu, pour faire place au gouvernail dans une espèce de chambre, qui le mettait à couvert des coups de mer dans le gros temps. Cette chambre était formée par les deux côtés de la poupe, qui laissant une large ouverture en dehors se rapprochaient peu à peu en dedans, où ils faisaient un angle rentrant, dont la pointe était coupée, pour donner au jeu du gouvernail toute la liberté.

Ce gouvernail était suspendu par deux câbles, dont les extrémités étaient roulées sur un vireveau placé sur la dunette, afin de le baisser et de le lever à propos, Deux autres câbles, qui après avoir passé par dessous le vaisseau, venaient remonter par la proue à l’avant, où on les bandait à l’aide