Page:Du halde description de la chine volume 2.djvu/31

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un grand chef de famille qui pourvoit à tous les besoins de ses officiers : cet usage qui n’a point varié parmi les Chinois, est assez conforme à ce qui se pratiquait anciennement dans la cour de nos rois, où il se faisait des distributions de pain, de vin, de viandes, de chandelles, et d’autres choses semblables, qu’on nommait livraisons, d’où est venu le nom de livrée, pour les gens de service qui étaient d’une même livrée ou d’une même distribution, c’est-à-dire, qui appartenaient au même maître.

Une grande partie des deniers impériaux se consomme dans les provinces, par les pensions, l’entretien des pauvres, et surtout des vieillards et des invalides, qui sont en grand nombre, les appointements des mandarins, le paiement des troupes, les ouvrages publics. Le surplus est porté à Peking, et est employé aux dépenses ordinaires du palais et de la capitale où le prince réside, et où il nourrit plus de cent soixante mille hommes de troupes réglées, sans compter leur solde qui se paye en argent.

De plus, on distribue tous les jours dans Peking à près de cinq mille mandarins, une certaine quantité de viande, de poisson, de sel, de légumes, etc, et tous les mois du riz, des fèves, du bois, du charbon, et de la paille ; tout cela se livre avec la dernière exactitude.

La même chose s’observe à l’égard de ceux qui sont appelés des provinces à la cour, ou que la cour envoie dans les provinces : ils sont servis et défrayés sur toute la route eux et leur suite : on leur fournit des barques, des chevaux, des voitures, et des hôtelleries entretenues aux dépens de l’empereur.

Voici comme la chose se pratique ; lorsqu’un mandarin est envoyé de la cour, on lui donne un cang ho, c’est-à-dire, un ordre dépêché de la cour par le ping pou ou tribunal de la milice, scellé du sceau de ce tribunal, en vertu duquel les officiers des postes et des villes fournissent sans délai ce qui est porté dans cet ordre et pour faire foi qu’ils l’ont exécuté, ils y apposent leur sceau. On fournit des hommes pour tirer les barques, d’autres pour porter les bagages, et c’est l’officier général des postes qui fait peser ces bagages, et qui donne autant d’hommes qu’il en faut pour les porter, à raison de 50 livres chinoises par homme.

Les troupes que l’empereur nourrit et entretient soit le long de la grande muraille, soit dans toutes les villes et les places murées montaient autrefois au nombre de sept cent soixante et dix mille soldats : ce nombre dans la suite a été encore augmenté, et subsiste toujours, car on ne fait point de réforme. Ils doivent servir de gardes, et faire escorte aux grands mandarins, aux gouverneurs, aux officiers et magistrats : ils les accompagnent même dans leurs voyages, et pendant la nuit ils font la garde autour de leur barque ou de leur hôtel. Ils ne sont qu’un jour en exercice, parce que les soldats de chaque lieu où arrive le mandarin, se succèdent les uns aux autres, et ils retournent à leur poste après leur jour de service. L’empereur nourrit pareillement environ cinq cent soixante-cinq mille chevaux pour monter la cavalerie, et pour le service des postes et des courriers, qui portent ses ordres et ceux des tribunaux dans les provinces.