Au reste, quoiqu’il s’agisse ici de savoir manier un pinceau, il ne faut pas s’imaginer que cet art s’apprenne à la hâte, et en courant, et qu’on parvienne aisément à former des caractères bien nourris. Il est nécessaire dans les commencements de s’accoutumer à être exact, et de s’efforcer d’atteindre à ce qu’il y a de plus parfait en ce genre.
Quand l’écriture est finie, chacun apporte au maître son ouvrage : il le parcourt, et marque d’un petit cercle les plus belles lettres ; il barre celles qui sont mal faites, afin qu’on sache ce qu’on doit corriger.
Quand il s’agira d’expliquer les livres, il commencera par proposer sommairement le sujet du chapitre qu’il veut expliquer. Ensuite le prenant par partie, il donnera : 1° La signification propre de chaque caractère ; 2° Le sens de toute la période. Il importe surtout de donner des idées nettes et précises, qui entrent aisément, et qui restent sans confusion dans la mémoire des enfants.
L’explication étant achevée, il renverra les étudiants chacun à sa table, pour la repasser en silence, et se les mieux imprimer dans la mémoire. Le jour suivant, avant que de passer à une nouvelle explication, il se fera rendre compte de la précédente. Les paraphrases du savant Tchang ko lao, sont l’ouvrage, qui peut mieux aider les étudiants à attraper le vrai sens des livres classiques : ils y sont expliqués fort clairement, et jusqu’à la moindre lettre.
Après l’heure des explications, il est ordinairement midi ; alors on va dîner. L’après-midi, comme le matin, les exercices commencent par réciter la leçon assignée, et l’on en détermine une nouvelle. Ensuite on se met à la composition tso toui[1]. On propose le sujet des toui tse, qui doit être plus ou moins étendu, selon que les jeunes disciples sont plus ou moins avancés.
Mais avant ce travail, on a donné à lire le livre, qui contient plusieurs modèles de ces sortes de compositions, afin qu’on sache comment il s’y faut prendre, et comment l’on doit placer les mots ou les caractères, selon les différents accents, pour avoir la cadence qui est nécessaire. En s’exerçant à ces ouvrages, on se forme le style pour les placets, pour les ordonnances, pour des lettres, et d’autres compositions, où le style familier n’est pas d’usage.
Les écoliers, soit le matin lorsqu’ils arrivent, soit le soir, en se retirant, doivent s’aller présenter devant la tablette de l’ancien maître, Sien Ssëe[2] et lui faire la révérence. Étant de retour chez eux, ils iront faire la même révérence à leurs parents, et aux personnes âgées de la famille[3]. Ce sont-là des devoirs de civilités, auxquels les jeunes gens doivent se former, afin que dans la maison et au dehors, on remarque toujours en eux un air de politesse, qui est si propre des lettrés.