si digne d’être aimé. Approchez donc, Yu et écoutez-moi attentivement[1].
Vos travaux pour remédier au déluge, m’ont touché. Vous êtes fidèle, et vos mérites sont grands. Vous êtes sage à mes yeux ; infatigable, quand il s’agit du bien public ; Vous êtes modeste chez vous ; après tout ce que vous avez fait, vous n’avez que de bas sentiments de vous-même. Encore un coup, vous êtes sage, vous ne vous vantez point de vos talents : il n’y a personne qui vous dispute l’habileté : vous n’élevez point vos belles actions et tout le monde vous cède le premier rang : ce que je cherche, c’est la vertu : ce que je loue, ce sont les bonnes œuvres. Je remets entre vos mains l’empire du monde : montez sur mon trône, et régnez. Songez qu’il n’y a rien plus à craindre qu’une passion[2], et la droite raison[3] est d’une délicatesse infinie. Il faut être pur, il faut être simple, il faut tenir en tout le juste milieu : ne vous amusez point à ce qu’on vous dira sans fondement et ne prenez jamais de dessein, que vous ne l’ayez bien examiné.
Qu’y a-t-il de plus aimable qu’un bon roi ? Qu’y a-t-il de plus à craindre que le peuple ? Qu’honoreront les peuples, s’ils n’honorent pas leur roi ? Mais comment se maintiendra-t-il sans le secours des peuples ? Appliquez-vous donc de toutes vos forces ; veillez nuit et jour sur les devoirs de votre charge ; surpassez, s’il se peut, les désirs et l’attente de vos sujets : prenez un soin particulier des pauvres et des misérables, et votre règne sera un règne éternel. L’ordre que je vous donne, fera la paix du monde ; et je dompterai par vous tous mes ennemis. Obéissez donc, et ne vous le faites pas ordonner davantage.
O ! Prince, que dites-vous ? C’est le Tien[5] qui a donné la vie aux hommes[6] : sujets, comme ils sont, à cent passions différentes, s’ils n’ont
- ↑ C’est là le morceau omis, dont on a parlé, et qu’on a renvoyé en cet endroit. Ce discours de l’empereur est en vers libres et mêlés : libres, parce qu’il y en a plusieurs sans rimes ; mêlés, parce qu’ils ne sont pas tous égaux. Si tout le Chu king n’est pas en vers, il y en a en plusieurs endroits, comme en celui-ci, semés de côté et d’autre.
- ↑ Le texte dit : gin sin, cœur de l’homme : ce n’est pas proprement passion, mais c’est le penchant qui nous y conduit : c’est comme la partie inférieure de l’âme.
- ↑ Le texte dit : tao sin, cœur de la raison : ce n’est pas proprement la raison ; c’est la partie supérieure de l’âme, qui se porte vers la raison la plus droite, et la plus pure.
- ↑ Ce Tching tang détrôna le tyran Kié, avec lequel la famille Hia fut éteinte.
- ↑ Le Ciel.
- ↑ Voici comment parle l’ancien commentaire Tching y : le Tien produit l’homme, et lui donne un corps et une âme. Chacun de nous a donc un corps visible et matériel : il a