Page:Du halde description de la chine volume 2.djvu/427

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

n'ont pas un maître qui les retienne dans le devoir, ils ne peuvent vivre en paix : mais le Ciel leur envoie un très sage roi, et c’est par son moyen qu’il peut les rendre bons et heureux.

L’infâme Kié avait éteint toutes les lumières de la raison, et le pauvre peuple était tombé comme dans un étang de feu : mais le Ciel vous a donné toute la prudence et toute la force nécessaire pour délivrer l’univers de tous ses maux. Achevez ce que le grand Yu a bien commencé : suivez ses traces, et obéissez avec respect aux ordres du Ciel. Le roi de Hia est coupable ; son crime est d’avoir employé, comme il faisait, le nom du Très Haut, pour faire garder ses commandements iniques. Le Ciel l’a châtié, et il vous a chargé de l’empire, pour rendre au monde son premier bonheur.

Vous savez que le cruel Kié avait encore quelques sages auprès de sa personne : mais le plus grand nombre de ses gens ne valaient pas mieux que lui. Nous nous trouvâmes dans ce temps funeste mêlés avec tous ces scélérats, comme un peu de bon grain semé dans un champ rempli d’ivraie. Comment pouvoir éviter les dangers qui nous environnaient de toutes parts ? Il n’y avait personne qui ne tremblât pour soi ; et c’était assez pour devenir suspect, que de n’avoir point de crime. Combien plus deviez-vous craindre, vous Prince, qui êtes orné de tant de vertus ? La renommée les répandait partout : on vous regardait comme un sage prince très éloigné de tous les sales plaisirs, et nullement attaché à son intérêt, ne distribuant les charges qu’aux plus vertueux, et mesurant toujours la récompense au mérite. On savait que vous préfériez avec plaisir le sentiment d’autrui au vôtre ; que vous attribuiez aux autres tout le bien que vous faisiez ; que vous ne vous excusiez jamais, et que vous étiez toujours prêt de vous corriger. Enfin on voyait dans vous une grandeur d’âme digne de l’empire de l'univers, jointe à une bonté et à une tendresse de père pour vos sujets. Tant de vertus vous avaient gagné tous les cœurs. C’est pourquoi le petit roi Ko ayant rejeté brutalement vos présents, vous fûtes obligé de marcher contre lui, et ce fut par là que vous commençâtes vos justes conquêtes. Étiez-vous à l’orient ? les peuples de l’occident vous attendaient avec impatience. Mettiez-vous la paix dans le nord ? les barbares du midi soupiraient après vous et chacun s’écriait comme en se plaignant : pourquoi n’est-il pas venu d’abord à notre secours. On n’entendait que des gens qui se disaient

    aussi une âme spirituelle et intelligente. L’homme étant produit de la sorte, le Tien l’assiste ; je ne veux pas dire simplement que le Tien, après lui avoir donné un corps et une âme, lui fait diverses lois ; mais je dis qu’il l’assiste encore d’une manière plus particulière. Car l’homme pense, agit, parle, distingue le vrai du faux, et le bien du mal : il a besoin de nourriture et d’habits : il se trouve tantôt dans l’abondance, et tantôt dans la disette : il est tour à tour en mouvement et en repos. Or, pour garder en tout cela une exacte justice, il faut certainement un secours du Tien ; car il y a là-dedans un droit chemin ; si on le suit, on est heureux, et si on s’en écarte, on n’a point de bien. C’est pourquoi le Ciel s’unit à l’homme, et l’aide à marcher constamment dans cette route qui conduit à l'immortalité.