Page:Du halde description de la chine volume 2.djvu/484

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féroces ; laissons-le tel qu’il est, ce serait me tourmenter vainement, que de vouloir l’apprivoiser. C’est ainsi que rien ne peut inquiéter le sage, et que les injures les plus grossières ne sont pas capables de troubler sa tranquillité.

Enfin il finit ce chapitre. 1° Par montrer que quoique les sages agissent différemment selon les conjonctures où ils se trouvent, c’est cependant le même esprit, la même équité, et la même droiture de cœur, qui est le principe de leurs actions. 2° Par des invectives contre ceux qui mettent en œuvre les plus indignes bassesses, et les flatteries les plus serviles, pour parvenir aux charges et aux dignités, mais que la bonne fortune aveugle, et qui deviennent insolents dans l’élévation.


CHAPITRE TROISIÈME.


Mencius fait voir jusqu’où le prince Chun porta son amour, son respect et son obéissance envers son père et sa mère. L’empereur Yao se voyant accablé du poids des années, et des infirmités compagnes ordinaires de la vieillesse, lui confia le gouvernement de l’empire. Dans le sein de la grandeur, au milieu des honneurs, des richesses, de l’opulence, et des applaudissements d’un grand peuple, il ne pouvait goûter aucun plaisir, parce qu’il voyait son père et sa mère livrés à des passions honteuses : et toute son attention allait à chercher les moyens de les faire rentrer dans les voies de la vertu. C’est ce qui lui faisait souvent pousser des soupirs vers le Ciel ; et quoiqu’il fût âgé de 50 ans, et le maître de l’empire, il persévéra jusqu’à la mort dans la pratique de tous les devoirs que prescrit la piété filiale.

Il fait voir ensuite les égards extraordinaires qu’il eut pour son frère nommé Siang, prince dénaturé, qui avait plusieurs fois attenté à la vie de l’empereur son frère. Loin de punir son crime lorsqu’il en eut le pouvoir, il le combla d’honneurs, de bienfaits, et de richesses.

L’empereur Yao étant prêt de mourir, laissa l’empire à son ministre Chun préférablement à son fils, en qui il ne trouvait aucune des qualités nécessaires pour bien gouverner ; sur quoi un des disciples de Mencius lui demande, s’il est au pouvoir d’un empereur de priver ainsi son fils de l’héritage paternel.

Non, répondit Mencius, c’est le Ciel qui en dispose, c’est le Ciel qui a donné l’empire au prince Chun : l’empereur Yao n’a fait que le proposer au Ciel, le Ciel l’a agréé ; les peuples frappés de l’éclat de ses vertus, se sont soumis sans peine à cet ordre du Ciel, et sont venus en foule reconnaître le nouvel empereur. Ce concours des suffrages, ce mouvement unanime de toutes les parties de l’État n’a rien de naturel, et ne peut être que l’effet d’une volonté supérieure, qui préside aux événements. C’est une chose certaine, ajoute-t-il qu’on ne doit attribuer qu’aux ordres du Ciel, les événements dont on ne voit point la cause. Du reste, le Ciel ne rejette du