Page:Du halde description de la chine volume 2.djvu/543

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Tan ouang roi de Yen, quoique de la maison régnante, entrait dans un parti qui se formait. Tchao ti qui en fut instruit, lui écrivit la lettre suivante, et la lui envoya scellée de son sceau.


Kao ti, dont nous avons tous deux l’honneur de descendre, devenu maître de l’empire, donna des apanages aux princes de sa maison, pour en multiplier les appuis. Depuis ce temps-là les Liu[1] par de secrètes intrigues ayant essayé de nous supplanter, tous les Lieou demeurèrent unis entr’eux contre leurs ennemis communs. Ils eurent pour eux le prince de Kiang et d’autres. On extermina les Liu et notre maison fut maintenue sur le trône dans la personne de Ven ti. Les Fan, les Ki, les Tsao, les Koan, ces familles à qui Kao ti était si redevable pour leur attachement et leurs services ; ces familles, dis-je, multipliées considérablement, se trouvent depuis du temps comme confondues avec les autres, dans toutes sortes de conditions. Grand nombre de gens qui en sont, labourent la terre, et souffrent beaucoup sans murmure. On en a élevé quelques-uns par reconnaissance ; mais aucun n’a monté plus haut qu’au rang de heou, vous le savez ; et vous n’ignorez pas aussi que ceux de notre maison ont été traités tout autrement. Tel, sans avoir seulement paru en campagne, ni rendu le moindre service, entra, pour ainsi dire, en partage de l’empire. On lui assigna un domaine : on l’honora du titre de vang ou de roi : on lui fournit même de grosses sommes. Voilà comme en usa Kao ti envers ceux de sa maison, et ces bienfaits se sont tellement perpétués depuis, que le père venant à mourir, le fils lui a succédé et l’aîné venant à manquer, on a fait passer l’héritage aux cadets ; c’est à votre sang que vous devez tout ce que vous êtes : vous le savez ; et c’est contre ce même sang, que vous élevant aujourd’hui, au lieu de l’attachement et du zèle qu’il devrait vous inspirer pour le chef de votre maison, vous vous unifiés contre moi avec des gens qui ne vous tiennent en rien. Vous formez, ou du moins vous appuyez un parti rebelle. S’il est accordé aux morts d’être instruits de ce qui se passe ici, de quel front oserez-vous désormais vous présenter dans le miao de vos ancêtres, pour y faire en leur honneur les cérémonies ordinaires ?


L’empereur Cang hi dit sur cette lettre de Tchao ti : Le grave, le solide et le tendre s’y suivent bien, et s’y soutiennent mutuellement. Les expressions d’ailleurs sont bien liées. Elle était très propre à toucher.

  1. Nom d'une famille laquelle profitant du crédit d'une impératrice régente, qui en était, pensait à s'emparer du trône.