Page:Du halde description de la chine volume 4.djvu/174

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ce seigneur, voulait lui donner en cela une marque de considération et d'affection, parce que So san laoyé avait témoigné à cet officier de la chambre de l'empereur, qui avait passé et repassé en notre camp, allant et revenant de visiter le Grand lama de Kalka de la part de Sa Majesté, qu'il souhaiterait fort de voir appeler le cerf, n'ayant jamais vu cette chasse, à laquelle l'empereur prend tant de plaisir, qu'il y passe les jours entiers : en quoi cet adroit seigneur prétendait sans doute flatter la passion de Sa Majesté. L'empereur laissait à Kiou kieou, Ma laoyé, et à nous la liberté de venir à notre loisir, et ordonnait à Ou laoyé de demeurer au lieu où nous étions, avec les autres officiers de son Tribunal, pour avoir la vue sur les Mongous qui sont campés sur les frontières, et tenir la main à ce que les ordres de la cour se portassent en diligence par tout ce pays-là. Le même jour quelques-uns de ceux qui avaient été députés vers les ambassadeurs moscovites, et qui n'avaient pu suivre les premiers venus, arrivèrent en notre camp ; l'un des plus considérables et des plus intelligents d'entr'eux, proche parent de So san laoyé, me dit que le climat, où Selengha est situé, est fort doux, et à peu près aussi chaud que Peking ; que les terres y sont fort bonnes, et fort grasses ; qu'elles portent de beaux blés, et de bons fourrages ; que les eaux y sont bonnes ; qu'il y a beaucoup de montagnes, et des bois en quantité ; qu'il y a auprès de la ville une fort grande rivière, sur laquelle les Moscovites ont environ dix-huit à vingt barques ; que les maisons de Selengha sont toutes de bois, mais bien bâties : que les Moscovites les avaient bien traités. Il jugeait qu'il pouvait y avoir du lieu où nous étions campés, jusqu'à Selengha, environ 1500 ou 1590 lys, que depuis le lieu où ils s'étaient séparés de nous, lorsqu'on les envoya porter la lettre, jusqu'au lieu où le roi de Kalka tenait sa cour, il y avait 540 ou 550 lys ; qu'ils avaient presque toujours marché droit au nord jusque là, et depuis là même jusqu'à Selengha, si ce n’est qu'ils avaient souvent tournoyé à l'entour des montagnes. Le temps fut fort serein tout le jour, et assez chaud, ayant fait peu de vent, quoiqu'il fît fort frais le matin. Le 16 nous partîmes à la pointe du jour tous ensemble, et après avoir marché quelque peu de temps de compagnie avec So san laoyé, il prit les devants avec les chevaux de poste qu'il avait pour lui et pour son équipage. Il en avait près de 25 ou 30. Nous fîmes ce jour-là cent lys droit à l'est, le pays toujours sables, la plupart fermes, mais stériles. Nous fîmes seulement partir quantité de perdrix et de lièvres, quelques cailles ; les faucons de Kiou kieou prirent quatre ou cinq de ces dernières. Nous campâmes dans des sables mouvants, sur une petite hauteur, au bas de laquelle il y avait de l'eau courante, mais salée, et l'on n'en put trouver qui fût douce, quoiqu'on creusât des puits en plusieurs endroits ; aussi tous les lieux bas d'alentour, aussi bien que tout le pays que nous avions traversé ce jour-là même, étaient pleins de sel, et la surface des sables était toute blanche.