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Page:Du halde description de la chine volume 4.djvu/190

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mais comme nous tournoyâmes beaucoup à l'entour des montagnes qui sont en partie fort escarpées, mais moins couvertes de grands bois, lorsqu'on approche de la grande muraille, parce qu'on les a coupés, j'estime que notre route a été de cinquante lys au sud-ouest. En approchant de Kou pe keou nous découvrîmes la grande muraille ; elle s'étend le long des montagnes à l'orient et à l'occident, à peu près de même que je l'ai remarqué à notre sortie de la Chine au commencement de ce voyage. La muraille s'élève jusque sur les pointes des rochers les plus escarpés, et est flanquée de tours carrées assez près les unes des autres, pour pouvoir se défendre mutuellement. Cette muraille, ainsi que je l'ai vu dans quelques endroits, où il y a des brèches assez considérables, est faite de deux parois qui n'ont pas chacune plus d'un pied et demi d'épaisseur ; l'entre-deux est rempli de terre, qui s'élève jusqu'au parapet ; la muraille, de même que les tours, a quantité de créneaux ; elle est bâtie de gros quartiers de pierre jusqu'à six ou sept pieds de terre, en quelques endroits plus, en d'autres moins ; le reste est de brique ; le mortier qui en fait la liaison paraît fort bon ; elle n'a pas ordinairement plus de dix-huit, ou vingt à vingt-cinq pieds géométriques de hauteur, mais les tours n'en ont guères moins de quarante ; leur base peut être de douze à quinze pieds géométriques en carré, puis elles s'étrécissent insensiblement jusqu'au sommet. On a pratiqué des degrés de pierre ou de brique dans le terre-plein, qui est entre les parapets pour monter et descendre plus facilement ; mais cette muraille, ainsi que je l'ai déjà observé, est de peu d'utilité sur ces montagnes inaccessibles. D'ailleurs de ce côté-ci, il y a plus de soixante ou quatre-vingt lieues de détroits de montagnes du nord au sud, où se trouvent plusieurs passages si difficiles, que deux ou trois cents hommes peuvent en empêcher l'entrée aux armées les plus nombreuses ; aussi y a-t-il beaucoup moins de forts avancés, d'enceintes, et de forteresses que de l'autre côté, par où nous passâmes en entrant dans la Tartarie. Seulement avant la porte qui est à la sortie de ce détroit des montagnes, se trouvent quelques tours détachées et situées sur des hauteurs, à sept ou huit cents pas de la grande muraille. Il y a de plus, deux ailes ou pans de muraille fortifiés de tours d'espace en espace ; mais ces deux pans de muraille et leurs tours tombent en ruine en plusieurs endroits, sans qu'on se mette en peine d'en réparer les brèches. On s’est contenté de rétablir à neuf le pan de la grande muraille qui est dans la vallée, laquelle n'a pas plus de cent pas géométriques. Une petite rivière coule au pied, mais elle se passe à gué. Là même sont deux petites portes fort basses, l'une qui communique à une petite forteresse, qui est du côté de l'est attenant la grande muraille, à laquelle elle sert de défense ; l'autre porte communique au faubourg de Kou pe keou qui forme une espèce de forteresse ; elle est environnée de murailles et de tours comme l'autre, et a deux ou trois places d'armes, avec autant de portes à l'entrée et à la sortie.