Page:Du halde description de la chine volume 4.djvu/240

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vis-à-vis les plénipotentiaires moscovites, il n'y avait que le Père et moi qu'on fit asseoir à côté de nos ambassadeurs dans l'espace qui était entr'eux et les Moscovites ; quatre maréchaux de camp étaient aussi assis derrière les ambassadeurs ; tous les autres officiers et mandarins étaient debout. Dès que tout le monde eut pris sa place, ce qui se fît avec toute sorte d'égalité, car on avait mis pied à terre de part et d'autre, on s'était assis, et on s'était salué en même temps ; les Moscovites exposèrent leur commission par la bouche d'un de leurs gentilshommes de l'ambassade, qui était polonais de nation, et qui avait étudié en philosophie et en théologie à Cracovie ; il s'expliquait aisément et assez clairement en latin. Après avoir exposé leurs commissions, ils prièrent nos ambassadeurs d'exposer la leur à leur tour, et de commencer à parler d'affaires ; ils s'en excusèrent, voulant obliger les Moscovites à s'expliquer les premiers. Après bien des cérémonies qui se firent civilement de part et d'autre, pour se déférer l'avantage et l'honneur de parler le premier, enfin le plénipotentiaire de Moscovie demanda à nos tagin s'ils avaient plein pouvoir de traiter de la paix et des limites, et il offrit en même temps de montrer les siens, écrits dans des patentes en bonne forme ; nos tagin refusèrent de les voir, et s'en rapportèrent à leur parole. On convint que l'on ne parlerait point de tout le passé, ni des affaires de moindre conséquence, jusqu'à ce qu'on eût déterminé les bornes qu'on devait mettre entre les deux empires, ce qui était le seul point d'importance qu'on avait à traiter. Saghalien oula ainsi appelé par les Tartares, c'est-à-dire, le fleuve Noir, et par les Moscovites Onon amour, est un fleuve qui prend sa source dans les montagnes qui sont entre Selengha et Niptchou, et qui a son cours de l'occident à l'orient, portant de grands bateaux dans l'espace de plus de cinq cents lieues jusqu'à la mer Orientale, où il va se décharger à la hauteur d'environ 53 ou 54 degrés après s'être grossi de plusieurs autres rivières ; on m'a assuré qu'il avait près de quatre ou cinq lieues de largeur vers son embouchure. Le plénipotentiaire de Moscovie proposa que ce fleuve fît la séparation des deux empires, en sorte que tout ce qui serait au nord du fleuve, appartînt à la couronne de Moscovie ; tout ce qui est au sud du même fleuve appartînt à l'empire de la Chine ; nos ambassadeurs n'avaient garde de consentir à cette proposition, ayant des villes et des terres assez peuplées qui sont au nord de ce fleuve, et surtout la chasse des zibelines étant dans les montagnes qui sont au-delà du fleuve. C’est pourquoi ils firent une proposition exorbitante, et demandèrent beaucoup plus qu'ils ne prétendaient obtenir. Ils proposèrent donc que les Moscovites se retirassent jusqu'au-delà de Selengha, laissant cette place, celle de Niptchou, d'Yacsa, et toutes leurs dépendances à leur empire, auquel ils disaient qu'elles avaient autrefois toutes appartenu, ou payé le tribut, parce que du temps que les Tartares occidentaux au regard de la Chine, s'étaient