Page:Du halde description de la chine volume 4.djvu/25

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

quelques habitants, et sur ce qu’au-delà du 51e on ne voit aucune terre ferme étendue le long de la côte, ce qui toutefois devrait être, si l’île était plus longue.

Elle est appelée diversement par les gens du continent, suivant les divers villages de l’île, où ils ont accoutumé d’aller, mais le nom général qui lui conviendrait, serait Saghalien anga hata, île de l’embouchure du fleuve Noir, puisque c’est par cette expression qu’ils s’accordent à la désigner. Le nom Huyé que quelques gens de Peking ont suggéré, est parfaitement inconnu et aux Tartares du continent, et aux habitants de l’île.

Les Mantcheoux qui y ont été envoyés, n’ont appris que les noms des villages par où ils ont passé, et le défaut de commodité les a obligés à revenir plus tôt qu’ils n’auraient souhaité. Ils disent que ces insulaires ne nourrissent ni chevaux, ni autres bêtes de charge, qu’ils ont cependant en plusieurs endroits une espèce de cerfs domestiques, qui tirent leurs traîneaux, et qui suivant la peinture qu’ils en ont fait, sont semblables à ceux dont on se sert dans la Norvège : ils n’ont point entendu parler de terre de Iesso : elle doit être en effet plus basse vers le sud de 5 à 6 degrés suivant nos cartes, et les cartes portugaises du Japon, d’où cette île n’est pas éloignée, ne passant apparemment pas au-delà du 45e degré de latitude : ce que nous laissons aux autres à déterminer au juste.

Mais ce que nous pouvons dire avec certitude, c’est que rien n’est plus fabuleux que ce pays de Iesso, comme le nomment les géographes chinois, qu’ils font d’une très grande étendue, et qu’ils veulent être une partie de la Tartarie orientale, habitée par une nation belliqueuse et redoutable aux Japonais : car outre ce que nous avons déjà dit des bords de la mer, dont nous avons fixé plusieurs points, en déterminant l’embouchure de plusieurs rivières, les Mantcheoux Yu pi ta se et Ke tcheng ta tse dont les terres sont contigües, et qui battent continuellement la campagne pendant le temps de leur chasse des martres zibelines, dans toutes les terres qui sont à l’est et à l’ouest de leurs habitations, jusqu’auprès du 55e parallèle, pourraient-ils ne pas connaître des gens si terribles, dont le corps est tout velu, dont les moustaches sont pendantes jusques sur la poitrine, et qui ont l’épée attachée par la pointe derrière la tête ; dont le pays, suivant ces géographes, devrait au moins commencer vers le 43e degré, c’est-à-dire, tout auprès de Hontchun, où nous n’avons trouvé qu’un petit nombre de Koel ka ta tse, confondus maintenant, ainsi que nous l’avons déjà remarqué, avec les Mantcheoux, tant pour le langage que pour les manières. C’est pourquoi, sans examiner davantage si les auteurs chinois ont entendu par Ye tze, ce que nous connaissons sous le nom de Iesso, il suffit de savoir que tout ce qu’ils ont dit de cette partie du continent et de ses habitants n’a rien de réel, et qu’on doit s’en tenir à ce que les relations du Japon nous ont appris de l’île de Iesso, qui en doit être assez voisine, et où se retirèrent même quelques chrétiens japonais, qui y furent assistés par l’illustre père Jérôme des Anges, qu’on fit mourir l’an 1623 à Yendo, à la tête d’une troupe de 50 martyrs.