Page:Du halde description de la chine volume 4.djvu/287

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étant allé faire notre explication de géométrie à l'empereur comme les jours précédents, et ayant commencé par expliquer différentes pratiques des logarithmes, Sa Majesté nous fit dire après le dîner, qu'il voulait nous faire goûter du vin qu'on lui avait envoyé des provinces méridionales ; il nous fit demander combien nous avions accoutumé d'en boire dans notre maison, et comment nous le buvions ; après quoi il nous fit donner une coupe d'un très beau cristal faite en forme de calice, et gravée de différentes figures avec la pointe du diamant ; il nous demanda à quoi cette coupe servait, et ayant été obligés de répondre que c'était à boire, il nous répondit en riant, que puisque cela était ainsi, il fallait que nous bussions chacun une des coupes pleines de vin ; nous nous en excusâmes, et nous en fûmes quittes pour boire chacun une de ces petites tasses, dont les Chinois se servent pour le vin, qui ne tiennent pas la moitié d'un de nos verres médiocres ; Sa Majesté nous fit l'honneur de nous donner de sa main cette petite tasse de vin qu'il avait auparavant fait remplir, et quand nous eûmes achevé de la boire, il nous demanda si nous en voulions encore, de quoi nous le remerciâmes, et ensuite nous commençâmes notre explication de géométrie. Ce même jour-là, cinquième d'avril, nous eûmes avis par un exprès dépêché de Tsi nan fou, capitale de la province de Chan tong, que le gouverneur d'une petite ville de cette province avait suscité une persécution aux chrétiens de ce lieu-là, et que nonobstant la lettre que le père Pereira lui avait écrite pour le supplier de relâcher des chrétiens qu'il tenait en prison, et de ne les point traiter comme des sectateurs d'une fausse loi, puisque l'empereur avait déclaré par une dépêche publique, qu'on ne devait pas traiter ainsi la loi chrétienne ; ce gouverneur sans déférer à la prière du Père, ni respecter la dépêche de l'empereur enfermée dans la lettre, avait déchiré sur-le-champ la lettre, et fait donner vingt coups de fouet à celui qui l'avait apportée, quoiqu'il ne fût pas du ressort de son gouvernement, et autant à celui qui l'avait introduit ; qu'ensuite il avait envoyé reprendre et mettre en prison ceux des chrétiens qu'il avait relâchés pour de l'argent, et qu'il avait fait citer à son Tribunal le père Vallat, pour le punir de ce qu'il avait prêché la loi chrétienne dans son district. On ajoutait qu'il avait protesté que, quand il devrait perdre son mandarinat, il voulait pousser le Père à bout. Aussitôt que nous eûmes appris cette nouvelle, nous en fîmes part à Tchao laoyé, qui se chargea d'en avertir l'empereur, et de lui représenter que s'il n'avait la bonté de nous protéger et de faire quelque chose en faveur de notre religion, nos Pères et nos chrétiens seraient toujours exposés à de semblables insultes, parce que la défense d'embrasser la religion chrétienne dans la Chine subsistait encore, nonobstant la bienveillance dont l'empereur nous honorait. Le 7 nous allâmes à la maison de plaisance de l'empereur pour faire notre explication accoutumée. Il nous reçut avec sa bonté ordinaire, et nous envoya à manger des mets de sa table comme les jours précédents. Tchao