Page:Du halde description de la chine volume 4.djvu/348

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

dirent mille choses à l'avantage des sciences d'Europe ; l'empereur en parla lui-même d'une manière très obligeante pour nous. Le 7 nous fîmes 60 lys, presque toujours dans une vallée assez large, et qui pouvait passer pour une plaine, où il y avait un bon nombre de hameaux et de métairies, et de terres labourées. L'empereur fit étendre tous les gens de sa suite dans la plaine, de telle sorte, qu'ils occupaient toute la vallée, jusqu'au pied des montagnes qui la fermaient de part et d'autre ; on marcha ainsi, battant toujours la campagne, qui était pleine de lièvres ; l'empereur en tua quantité. Après avoir marché pendant quelque temps, il se détourna du grand chemin pour entrer dans des montagnes médiocrement hautes, et pleines de broussailles et de bois taillis. On y fit deux ou trois enceintes, dans lesquelles Sa Majesté tua quantité de cerfs et de chevreuils ; il est surprenant de voir avec quelle adresse ses gens détournaient le gibier pour le faire passer devant l'empereur ; car personne n'ose tirer sur une bête, tandis qu'elle est dans l'enceinte, ni la laisser sortir à l'endroit où il est placé ; c’est une faute punissable parmi les Tartares ; ils regardent la chasse comme une image de la guerre, et ils sont persuadés que celui qui ne sait pas bien garder son rang, et qui manque à son devoir à la chasse, y manquerait de même à la guerre. C’est sur ce principe que l'empereur a souvent cassé des premiers officiers de ses troupes, pour n'avoir pas su conduire et gouverner les chasseurs en faisant ces sortes d'enceintes. Je me souviens qu'au retour de notre voyage de Niptchou un officier de mérite et fort brave, qui avait fait les deux mêmes voyages que nous en qualité de lieutenant général des troupes de l'empereur, et qui était un des généraux de l'avant-garde (c'est une charge qui répond à celle de nos maréchaux de France), fut dépouillé de ses charges, pour n'avoir pas tenu une de ses enceintes en bon état, et ne l'avoir pas rétabli lorsque Sa Majesté lui envoya ordre de le faire. Le temps fut fort serein tout le jour avec un grand vent de nord qui modéra la chaleur. Ce jour-là l'empereur ayant été content de la chasse, fit distribuer le gibier qu'il avait tué lui et ses enfants, aux officiers et aux soldats qui avaient formé les enceintes. Le soir il donna la comédie aux seigneurs de la cour et à ses officiers domestiques, dans l'enceinte de sa tente ; pour cela il fit abattre une partie de cette espèce de muraille de toile, qui ferme l'enceinte où sont ses tentes. La comédie se représenta sous son pavillon, par une troupe d'eunuques comédiens qu'il avait menés avec lui. Le 8 l'empereur qui avait envoyé des gens la nuit précédente pour chercher des tigres, ayant su qu'on en avait trouvé deux, partit de grand matin, et les alla chasser. Le premier était sur le penchant d'une montagne extrêmement escarpée. L'empereur monta sur le penchant de la montagne opposée, et après avoir posté les piqueurs et les autres chasseurs à l'ordinaire, on tira d'abord plusieurs coups d'arquebuse vers l'endroit où on l'avait