Page:Du halde description de la chine volume 4.djvu/563

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retourner dans un pays que son père avait abandonné, et continua de protéger le Grand lama de toutes ses forces. Ce fut avec le petit-fils de Couchi han, nommé Talai han, que le Tse vang raptan a eu la guerre ; sa vue était, disait-il, de remettre les lamas sur l'ancien pied, et de les réduire au point de n'avoir d'appui que dans la bonté et dans la puissance des princes du pays. Il disputait même au Grand lama sa qualité, et prétendait qu'il était un faux lama. Quoique Talai han eût d'abord assemblé une armée de vingt mille hommes, sans y compter quelques compagnies de Tartares étrangers qu'il avait incorporées dans ses troupes, il fut défait et tué dans le combat que lui livra l'armée de Tse vang raptan, qui n'était composée que de cinq à six mille hommes, mais qui était commandée par un grand général, son parent. Le pays de Lasa fut ravagé, les villes prises aussitôt qu'assiégées, et les pagodes entièrement pillées. On n'épargna pas celle du Grand lama, où l'on trouva des richesses immenses qu'il avait amassées depuis plusieurs années. Tous les lamas qu'on trouvait, on les enfermait dans des sacs, qu'on chargeait sur des chameaux, pour les transporter en Tartarie. Il s'en fallut peu que les lamas qui ont dressé la carte, ne fussent pris ; sans doute qu'ils n'auraient pas mieux été traités que les autres, parce qu'ils étaient du nombre de ceux qui portent le chapeau jaune, et qui ont abandonné la protection des princes du pays. Ce chapeau est fait d'un tissu de rotin doré, avec des feuilles d'or, sur une espèce de vernis, qui le rend roide, et difficile à plier. Au premier bruit de la marche des troupes de Tse vang raptan, nos lamas géographes se pressèrent de finir leur ouvrage ; et en effet, à peine furent-ils revenus de la source du Gange, que l'armée ennemie entra dans le Thibet, ce qui les obligea de se sauver au plus vite. Sans cela ils auraient pu aller plus loin. Ils se contentèrent de faire une carte de la source du Gange, et des pays qu'il enveloppe, sur le rapport des lamas qui demeurent dans les pagodes voisines, et sur les mémoires qu'ils trouvèrent à Lasa chez le Grand lama. Mais ils manquèrent à un point essentiel, qui était de prendre hauteur auprès du mont Kentaisse, ou autrement Kan te chan, comme le nomment les Chinois, lesquels étendent ce nom à toute la chaîne de montagnes qui va à l'occident ; ou du moins dans la pagode où ils s'arrêtèrent pour s'informer du cours du Gange qui sort à l'occident de cette montagne, tandis que le Tsanpou, qu'ils ont suivi et mesuré, vient à l'orient vers Lasa. C'est ce qui fit juger aux jésuites de la Chine, que la latitude de ce point, qui n'est appuyée que sur ces mesures, avait besoin d'être vérifiée par quelque observation qui pût servir à fixer entièrement le point de Kentaisse. Ils ont été persuadés que cette partie, comprise entre Kashgar et la mer Caspienne, ne leur était indiquée que très superficiellement, et que pour la joindre à leurs cartes dans quelque détail et précision qui eut de la correspondance avec ces cartes, ou qui y fut à peu près assorti, il était