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Page:Du halde description de la chine volume 4.djvu/70

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ne voulut entendre à aucun accommodement : il répondit encore une fois, que l'empereur était lui-même intéressé à punir des perfides, qui avaient rompu sans raison un traité dont il était le garant, aussi bien que le dalai lama : il ajoutait néanmoins que si Sa Majesté voulait remettre le lama Kalka entre les mains du dalai lama leur commun maître, et le chef de leur religion, pour le juger, qu'en ce cas il promettait de mettre les armes bas, et de cesser toute hostilité. L'empereur croyant qu'il était de sa grandeur de ne pas abandonner des princes dépouillés de leurs États, qui étaient venus chercher chez lui un asile ; d'ailleurs n'ayant plus rien à craindre de la part des Moscovites, avec lesquels il venait de conclure la paix à Niptchou, il prit les princes kalkas sous sa protection, et leur marqua un lieu dans ses terres de Tartarie, pour s'y établir et y vivre à leur manière : c’est ce qui donna occasion à la guerre qui s'alluma entre l'empereur et le roi des Eluths. Celui-ci vers la fin de juillet de l'année 1690 vint à la tête de quelques troupes peu nombreuses, mais fort aguerries, jusques sur les frontières de l'empire : il tua ou fit esclaves tout ce qu'il trouva de Kalkas campés le long de la rivière de Kerlon, qu'il avait suivi pour la commodité des fourrages ; et il alla chercher les meurtriers de son frère, jusques dans le lieu même où l'empereur leur avait donné une retraite. Au premier bruit de la marche de ce prince, l'empereur rassembla toutes les troupes des Mongous qui lui furent assujettis dès le commencement de la monarchie, et qui s'étant campés presque immédiatement au dehors de la grande muraille, sont comme les gardes avancées de l'empire : il joignit à ces Mongous quelques soldats mantcheoux, qui servaient d'escorte au président du Tribunal de la milice, et à celui du Tribunal des Mongous, qu'il avait envoyés sur les frontières, pour observer les mouvements des Eluths. Ces deux présidents songèrent à surprendre le roi d'Eluth dans son camp, et ils y réussirent : ils l'amusèrent sous prétexte d'un traité de paix, et lorsqu'il était moins que jamais sur la défiance, ils l'attaquèrent pendant la nuit, mais ils furent repoussés avec vigueur, et poursuivis jusques sur les terres de l'empire, où ils gagnèrent les montagnes qui les mirent en sûreté. L'empereur ayant appris cette nouvelle, fit partir en diligence une grosse armée de Peking, pour aller à la rencontre des Eluths. Il avait dessein de la commander en personne, et il m'avait fait avertir de le suivre : mais sur les remontrances de son Conseil, et des Grands de l'empire, il changea de résolution ; il en donna le commandement à son frère aîné qu'il établit généralissime, et il le fit accompagner par l'aîné de ses enfants, avec les principaux de son Conseil. L'armée marcha droit au roi d'Eluth, qui l'attendait de pied ferme environ à 80 lieues de Peking. Ce prince s'était campé avantageusement, et quoiqu'il manquât d'artillerie, dont l'armée impériale était bien fournie, et qu'il n'eût que très peu de troupes, il ne laissa pas avec des forces si inégales d'accepter le combat.