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DE PARIS AU NIGER

Les Européens se composent de fonctionnaires, d’officiers, de soldats. Les uns ayant achevé leurs dix-huit mois ou deux ans de séjour, rentrent se reposer en France. Les autres en arrivent tout frais, relever leurs camarades fatigués. Parfois on croise une civière où l’on entrevoit quelque pauvre tête de malade, et si l’on est pourvu de provisions et de quelque verve il est aisé de jouer le rôle du Bon Samaritain.

Malheureusement les commerçants ne fournissent encore qu’un infime apport aux rencontres. Pourquoi ? Vous trouvez la réponse sur la route même, dans ces bandes de porteurs que sans cesse vous croisez : la tête de l’homme est un moyen de transport trop primitif pour permettre un trafic plus développé.

L’idée vient aussitôt : mais que ne se sert-on de voitures ? Ce que j’ai dit des chemins soudanais suffit à expliquer l’absence de véhicules. La route n’existe guère que de nom. L’intendance militaire en sait quelque chose. Il lui faut ravitailler les forts ou postes dont nous avons piqueté nos vastes possessions nigritiennes au nord et au sud de Bammakou. Des Européens, peu nombreux cependant, vivent là entourés de quelques troupes noires, tirailleurs ou spahis soudanais, et maintiennent le pays en respect, le policent, l’organisent et le préparent à la pénétration. Il faut leur faire parvenir des vivres d’Europe : caisses de vin, grandes boîtes soudées en fer-blanc renfermant de la farine, du café, du sucre, barillets de viande salée, ainsi que des munitions, des armes, des effets d’habillement, des outils, etc. Pour acheminer ces approvisionnements Jusqu’au Niger, où seulement le transport devient facile grâce à la voie fluviale, l’intendance, elle, a des voitures, et en fer, et elle les met en marche sur ce fantôme de route. Mais au prix de quelles peines et dépenses, au moyen de quel personnel et de quelle organisation ! Il faudrait un volume pour le dire.