tins, poissons monstres — l’un debout à l’avant de l’esquif
long, étroit, instable, le jarret en avant, campé dans une
belle attitude d’attaque, tandis qu’un compagnon, accroupi
à l’arrière, sur signes, sans bruit, maniait la pagaie. Noirs
les Bosos, noire la pirogue, comme un groupe de bronze
filets de pêcheurs
dans l’aveuglante lumière, ils avançaient immobiles sur les
flots jusqu’à ce que l’œil guetteur de l’homme d’avant eût
découvert quelque caïman sommeillant sur la rive, quelque
gros poisson barbu paressant à fleur d’eau. Alors la grande
silhouette nue campée à la proue se tendait ; dans un beau
mouvement de corps libre, le bras droit prenait son élan,
et tout à coup le harpon partait frapper la bête surprise.
Pour les proies de moindre importance, ils n’ignorent aucune des ingéniosités de nos pêcheurs : filets et pièges. Quand apparaissent les bandes des ténéni migrateurs, le fleuve semble convié à quelque fête vénitienne. Dès que la nuit est venue, il se couvre de pirogues sur lesquelles brillent de gais fanaux incitant les petits poissons au manger délicieux, à quitter les eaux profondes pour venir se faire prendre.
Gros ou petit butin, les Bosos n’ont qu’une même et pri-