Page:Dubos - Histoire critique de l'établissement de la monarchie françoise dans les Gaules, Tome I, 1742.djvu/143

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

me, & ceux que recevoit le lieutenant du Maître des soldats presens, se croisassent.

On voit bien que les Soldats presens étoient le nerf des armées Romaines. Ils étoient toûjours au drapeau ; & comme on les faisoit marcher par tout où il y avoit occasion de combattre, ils devoient être plus aguerris que les Soldats des Troupes qui étoient destinées à la garde de quelque Frontiere, & qui ne voyoient pas si souvent l’ennemi. Aussi Ammien Marcellin remarque-t’il comme un évenement singulier, que durant le siége que les Barbares mirent devant Autun, dans le tems où Julien commandoit l’armée des Gaules, les Troupes de Campagne se fussent comportées mollement, & que le salut de la Place eût été dû aux Véterans qui étoient de la Milice domiciliée, pour ainsi dire, sur la Frontiere.

Les Empereurs qui pouvoient s’aider contre leurs ennemis domestiques des Troupes de Campagne, bien mieux que des Troupes de Frontiere, avoient tant d’attention à tenir ces premieres complettes ; ils étoient si jaloux d’empêcher qu’il ne s’y glissât des mutins, qu’Arcadius et Honorius défendirent par une Loi expresse à leurs Comtes & à leurs autres Géneraux, non-seulement de laisser passer aucun Soldat Palatin ou Accompagnant du Corps où il avoit été enrôlé dans un autre Corps, mais aussi de recevoir dans ces Corps-là aucun Soldat, soit des Légions, soit des Troupes qui gardoient les Rives & Rivages, soit des autres Troupes de frontiere. Ces Princes déclarent même expressément dans leur Loi qu’ils réservent à eux seuls le pouvoir d’accorder ces sortes de translations, & ils condamnent les Officiers qui oseroient y contrevenir à payer autant de livres d’or d’amende, qu’ils auroient fait passer de Soldats d’une Milice dans une autre.

Quant aux Troupes attachées par leur institution à la garde de quelque Province frontiere[1], & que nous trouvons désignées sous le nom de Milites Limitanei, Riparenses, & au-

  1. Vopisc. im Probo.