Page:Dubos - Histoire critique de l'établissement de la monarchie françoise dans les Gaules, Tome I, 1742.djvu/164

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auroit bien facilité mon travail. Cet auteur nous apprend lui-même qu’il y donnoit un état fidéle des forces que l’empire romain avoit sur pied[1], et des revenus qu’il tiroit de chacune de ses provinces, sous le regne de l’empereur Adrien. C’est le tems où vivoit notre auteur. Un pareil ouvrage composé par un homme aussi-bien informé et aussi judicieux que l’étoit Appien, nous auroit instruits à fond de l’état des finances de l’empire dans le second siécle de l’ère chrétienne, et il nous auroit donné de grandes lumieres sur l’état où elles pouvoient être dans les tems postérieurs. C’est assez regretter une perte que le destin seul peut réparer. Tâchons de nous servir si bien des monumens qui nous restent, que nous ne laissions pas de donner une notion satisfaisante des revenus dont la monarchie romaine joüissoit dans les Gaules durant le quatriéme siécle et le cinquiéme.

Ces revenus, ainsi que ceux dont elle joüissoit dans ses autres provinces, émanoient de quatre sources. La premiere et la plus abondante consistoit dans les profits qui se retiroient des fonds de terre, dont la proprieté appartenoit à l’Etat. La seconde, c’étoit le subside reglé, ou l’imposition personnelle et réelle que chaque citoïen payoit soit à titre de capitation, soit à raison des terres et des autres biens ou effets qu’il possedoit. La troisiéme source des revenus du prince consistoit dans le produit des differens bureaux établis dans les Gaules, pour y faire payer les droits de péage ou de doüane. Les revenus qu’on appelle casuels faisoient la quatriéme source. Ils consistoient dans les réünions des domaines engagés, dans les confiscations, et dans les dons volontaires ou réputés tels, que les peuples faisoient au souverain en certaines occasions. Nous allons à présent parler séparément de chacune de ces quatre sources, ou de ces quatre branches du revenu de l’empire.

L’empire romain a toujours été proprietaire d’une grande quantité de fonds de terre. Une partie de ces fonds provenoit de la portion des terres que les Romains avoient coutume d’approprier à la république dans les païs qu’ils conquéroient. Ils en avoient usé dans plusieurs cités des Gaules comme en Sicile et ailleurs. L’autre partie de ces fonds provenoit des terres réünies au domaine de l’Etat, soit par désherence, soit par faute d’avoir acquitté les redevances dont elles étoient chargées, soit pour d’autres cas emportans réünion au domaine du prince.

  1. In Proëmio pag. 9. edit. anni 1594.