Page:Dubos - Histoire critique de l'établissement de la monarchie françoise dans les Gaules, Tome I, 1742.djvu/165

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On lit dans Appien Alexandrin, que les Romains dès leurs premieres conquêtes, avoient pratiqué l’usage d’ôter au peuple subjugué une partie de ses terres pour se les approprier ; et l’on voit par Tite-Live et par les autres historiens latins, qu’on lui imposoit cette peine plus ou moins forte, à proportion de la résistance plus ou moins obstinée qu’il avoit faite. Il arriva encore que dans la suite l’empire réünit à son domaine, les fonds de terre qui appartenoient en toute proprieté aux princes ses alliés, ou plûtôt ses sujets, lorsqu’il lui arrivoit de réduire leurs états en forme de province. Voici, suivant Appien, l’usage que les Romains faisoient de ces terres unies au domaine de la république. On les divisoit d’abord en deux classes, dont la premiere comprenoit les terres actuellement en valeur, et la seconde, les terres en friche. Quant aux terres qui étoient actuellement cultivées, et sur lesquelles il se trouvoit la quantité d’esclaves et de bétail nécessaire pour les faire valoir, on en faisoit deux lots, dont le premier se distribuoit entre les citoïens des colonies que la république établissoit dans le païs conquis pour le tenir dans le devoir. Le second lot se divisoit en deux parties. L’une étoit venduë au profit de l’Etat, afin de l’indemniser des frais de la guerre, et l’autre étoit affermée moyennant une redevance fixe, et stipulée payable en une certaine quantité de denrées.

Tout commerce étant interdit aux citoïens de l’ordre des sénateurs dès le tems de la république, il ne leur a jamais été permis de se rendre adjudicataires de ces baux. Il paroît donc que sous la république et sous les premiers empereurs, c’étoient les chevaliers romains qui les prenoient. Mais dans le bas-empire, il fut prohibé à tous ceux qui avoient quelque emploi au service du prince, et même à tout citoïen enrôlé dans les curies, de prendre à ferme les terres dont la proprieté appartenoit à l’Etat. On craignoit que les personnes qui avoient du crédit ne trouvassent moyen d’avoir ces fermes à trop bas prix, ou d’obtenir des indemnités qui ne seroient pas dûës. Une loi des empereurs Valens, Valentinien et Gratien, défend expressément aux citoïens enrôlés