Page:Dubos - Histoire critique de l'établissement de la monarchie françoise dans les Gaules, Tome I, 1742.djvu/284

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Grand-Prêtre n’étoit-il pas en Judée la premiere personne de l’Etat, quand il n’y avoit point de Roi ? Voilà, continuë Grotius, d’où vient le droit qu’a l’Evêque de Rome, de conférer les Fiefs Impériaux pendant la vacance de l’Empire. Durant ce tems-là, l’Evêque de Rome est la premiere personne du peuple Romain, & les droits appartenans à une societé, s’exercent ordinairement en son nom par la personne la plus apparente, par celle qui tient le premier rang dans cette societé. »

Les évêques des Gaules étoient chacun dans sa cité le premier citoïen, ainsi que le pape l’étoit à Rome. C’étoit donc à eux d’exercer pendant l’interregne, et au défaut de magistrats institués ou désignés par le prince, les droits appartenans à la societé, dont ils étoient la premiere personne, comme c’est au pape, suivant Grotius, à exercer, quand il n’y a point d’empereur, les droits qui appartiennent, ou qui sont censés appartenir au peuple Romain. Ainsi c’étoit à nos prélats à présider à l’administration temporelle de leurs diocèses, dès qu’ils n’avoient pas pû venir à bout d’empêcher que ces diocéses ne tombassent dans la funeste nécessité de se gouverner par eux-mêmes. Le droit de préséance emporte avec lui cette obligation. Voilà suivant mon opinion pourquoi plusieurs évêques saints, qui ont vêcu dans le cinquiéme siécle et dans le sixiéme, sont entrés si avant dans tous les projets et dans toutes les négociations qui se firent alors, pour rétablir l’ordre dans leurs diocèses, ou du moins pour y prévenir l’anarchie qui auroit operé leur entiere dévastation. Voilà pourquoi ils font une si grande figure dans l’histoire de l’établissement de la monarchie françoise. Le rang qu’ils tenoient dans leur païs, les obligeoit à se mêler de toutes les affaires, et nous verrons encore dans la suite qu’ils n’ont rien fait que leur conscience et leur honneur ne leur permissent pas.

Le conseil qui gouvernoit dans chaque cité, y aura institué un officier militaire pour commander les gens de guerre, c’est-à-dire, les milices et les troupes de frontiere, qui pour conserver leurs bénefices et leurs quartiers, se seront soûmises au nouveau gouvernement établi dans les païs où elles étoient réparties.

En quelles mains passa le pouvoir qu’avoit le préfet du prétoire des Gaules, et celui de géneralissime de ce département dans les Provinces-unies avant leur conféderation, après