Page:Dubos - Histoire critique de l'établissement de la monarchie françoise dans les Gaules, Tome I, 1742.djvu/41

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avec celles de l’Eveque de l’Auvergne, où l’on rencontre fréquemment des Vers dignes des meilleurs Poëtes Latins.

Il nous est encore demeuré quelques autres ouvrages sçavans du cinquiéme siecle & du sixiéme, mais qui ne sont pas aussi instructifs que ceux donc je viens de parler. Ainsi je remets à en donner la notice, que je sois au Chapitre de cet ouvrage, où j’en ferai usage pour la premiere fois.

Je tombe d’accord qu’en étudiant avec attention ces Loix, ces Actes & ces Ouvrages sçavans, on y ramasse une infinité de faits très-propres à faciliter, & l’intelligence des narrations tronquées de Gregoire de Tours, & l’explication de l’abrégé de Procope : Je tombe d’accord qu’on déterre dans tous ces monumens litteraires, des matériaux propres à faire partie d’une Histoire de France, mais on n’y trouve pas le plus léger crayon du plan de cette Histoire. Leurs Auteurs, quand ils les ont composés, avoient d’autres vûes que celles de laisser à la postérité l’Histoire du tems où ils vivoient. Ainsi quand il leur arrive de faire mention des ligues, des batailles & des autres évenemens de leur tems, ils la font sans nous en donner une relation méthodique, & même fans en marquer la date. Ils en ont parlé comme de chose dont leurs contemporains avoient déja une connoissance suffisante, ils en ont parlé relativement aux Histoires, qui pour lors étoient entre les mains de tout le monde. Si nos Auteurs ont dû penser quelquefois que leurs ouvrages passeroient à la posterité, ils auront pû penser en même tems que les Annales de leur siécle y passeroient aussi, & qu’elles donneroient les éclaircissemens nécessaires pour avoir une pleine intelligence de leurs Poësies & de leurs Epitres.

Après avoir lû la déduction que je viens de faire des Histoires & de tous les autres monumens litteraires qui nous restent du cinquiéme & du sixiéme siécle, on ne me contestera point la premiere des deux propositions que j’ai avancées ci-dessus : Qu’il est encore très difficile de composer l’Histoire de l’origine & des premiers progrès de la Monarchie Françoise, quoique nous ayons aujourd’hui tous ces monumens commentés & bien éclaircis par leurs Editeurs. A cette premiere proposition, j’en ai joint une seconde : Que ce qui n’étoit plus que difficile aujourd’hui, a été comme impossible avant l’invention de l’Imprimerie, & même jusques au tems où les monumens litteraires dont on vient de parler, se sont trouvés éclaircis suffisamment par les Sçavans qui les ont publiés ; c’est-à-dire, jusqu’à l’année mil six cens soixante & dix, ou environ. Prouvons cette seconde proposition.