Page:Dubos - Histoire critique de l'établissement de la monarchie françoise dans les Gaules, Tome I, 1742.djvu/529

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de Childéric gravée sur le métail du chaton de cet anneau qui est d’or, et on y lit cette inscription écrite en forme de legende Childerici regis. C’est sur quoi je renvoye aux livres qui nous ont donné l’estampe de ce cachet. Est-il croyable que Childérîc eût fait graver l’inscription qui caracterisoit son sceau, pour parler ainsi, et qui par conséquent en faisoit l’autenticité, dans une langue qui géneralement parlant n’étoit entenduë par ceux qui devoient obéïr aux ordres qui tiroient leur force de ce sceau ? Il est vrai que nos rois mettent autour des effigies et des écus qui sont sur leurs sceaux et sur leurs monnoyes des legendes latines, quoique la plus grande partie de leurs sujets n’entende point le latin. Mais nos rois, n’en usent ainsi, qu’en continuant l’usage ancien introduit sous la premiere race, et quand le latin étoit encore dans les Gaules une langue vivante, et même la langue la plus en usage. Au contraire, Childéric auroit introduit une nouveauté odieuse. Si l’on suppose que la legende des sceaux de son prédécesseur fût en latin, il faudra convenir que dès le tems de son prédecesseur, les Francs entendoient déja communément la langue latine.

Enfin le séjour que les barbares firent sur le territoire de l’empire dans le cinquiéme siécle souvent comme ses soldats, quelquefois comme captifs, dûrent rendre la langue latine une langue commune parmi ces peuples. Aussi Priscus Rhetor, écrivain grec, rapporte-t-il que se trouvant en qualité d’envoyé de l’empereur de Constantinople à la cour d’Attila, il fut surpris de voir qu’un homme vêtu en Scythe lui parloit grec, parce, dit-il, que les Scythes ne se servent guéres que de langues qui sont étrangeres pour nous autres Grecs. Nos barbares, ajoûte Priscus, parlent la langue des Huns, mais plus communément celle des Gots. Ceux d’entre eux qui ont eu occasion d’avoir plus de commerce avec les Romains, parlent latin.

Rien n’empêcha donc les Francs sujets du roi Childeric de prier Egidius de leur rendre la justice, et de leur tenir lieu de roi durant l’interregne. Je ne vois pas non plus ce qui pourroit avoir empêché Egidius de se charger de ce soin-là. Il a dû craindre, allegue-t-on, de se rendre suspect à l’empereur et à ses ministres, en acceptant la couronne qui lui étoit offerte par