Page:Dubos - Histoire critique de l'établissement de la monarchie françoise dans les Gaules, Tome I, 1742.djvu/77

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dotées. Les Evêques gardoient ou bien ils rendoient, suivant qu’ils le trouvoient convenable, les Esclaves, et même les criminels qui étoient venus chercher un azile dans les Temples des Chrétiens. Il y avoit plus. Les Loix Imperiales autorisoient les Evêques à se rendre en quelque sorte les tuteurs des veuves et des orphelins, comme à prendre connoissance des Jugemens qui se rendoient dans les Tribunaux Laïques, à suspendre l’execution de ces Jugemens, et même à les réformer en certains cas. Les personnes qu’ils avoient excommuniées étoient regardées comme mortes civilement, lorsqu’elles avoient laissé passer un certain tems sans faire les diligences nécessaires pour obtenir l’absolution. Ce qui donnoit encore un plus grand poids à l’autorité dont les Evêques des Gaules y joüissoient dans le cinquiéme siecle, c’est que la plûpart d’entr’eux ajoutoient à la consideration que leur dignité leur attiroit, le crédit sans bornes qui s’acquiert par un mérite personnel, éminent et reconnu de tout le monde. Si d’un côté nous voyons en parcourant le Martyrologe, que l’Eglise Gallicane lui a fourni durant le cinquiéme siécle et le siécle suivant un nombre d’Evêques mis au nombre des Saints, plus grand que le nombre qu’elle lui en a fourni durant tous les autres siécles mis ensemble, nous voyons aussi d’un autre côté dans l’Histoire, que ces Evêques saints ont été des Citoïens courageux et capables de faire tête à toute sorte d’orages. Il n’en faut point être surpris. Comme les premiers Pasteurs étoient alors choisis par les ouailles, plus les tems devenoient difficiles, plus les Diocesains avoient attention à n’élire pour leur Evêque qu’une personne capable de les défendre contre toute sorte d’ennemis. Dans cette vûë ils nommoient souvent pour être leur Evêque, un Concitoïen qui vivoit actuellement dans l’état du mariage, mais qui avoit fait voir beaucoup de mérite et de vertu, en exerçant les emplois du siécle, et on l’installoit après qu’il s’étoit separé d’avec sa femme. Aussi verrons-nous que les Evêques des Gaules eurent du moins autant de part à l’établissement de la Monarchie Françoise, que l’épée de Clovis.

Quant aux Citoïens Laïques des Gaules, nous les diviserons d’abord par rapport à la Religion qu’ils professoient. Les uns étoient Chrétiens, et les autres étoient ou Juifs ou Payens.

Dans la derniere dispersion des Juifs commencée sous l’Empire de Vespasien et consommée sous celui d’Adrien, plusieurs personnes de cette Nation se retirerent dans les Gaules, où elles