Page:Dubos - Histoire critique de l'établissement de la monarchie françoise dans les Gaules, Tome I, 1742.djvu/78

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

firent le bien & le mal qu’elles y ont fait jusques à leur derniere expulsion par notre Roi Charles VI et qu’elles font encore dans les Païs où le Souverain leur permet d’exercer leur Religion, et de faire un peuple à part. Les Juifs dans le cinquiéme siécle prêtoient donc à usure aux Particuliers, comme aux Communautés, et ils se mêloient autant qu’ils le pouvoient du recouvrement des revenus du Prince. Nous les verrons donner lieu par leurs exactions à plusieurs évenemens. D’un autre côté le menu peuple à qui le secours même qu’il en tiroit quelquefois, les rendoit odieux, leur imputoit déja outre leurs véritables crimes, tous les malheurs dont il ne voyoit point la cause. Il les rendoit responsables de l’intemperie des saisons et de la corruption de l’air. Voilà pourquoi Rutilius, Auteur du cinquiéme siécle, et qui a écrit en Vers la relation de son voyage de Rome dans les Gaules, dit : Qu’il seroit à souhaiter que Pompée et Titus n’eussent jamais subjugué la Judée, parce que la dispersion des Juifs dans tout l’Empire, n’avoit servi qu’à donner à cette Nation le moyen d’exercer ses talens funestes dans un plus grand nombre de païs, où ces vaincus opprimoient tous les jours leurs vainqueurs.

Durant le cinquiéme siécle il y avoit encore dans les Gaules, principalement dans leurs Provinces septentrionales, plusieurs Payens, nonobstant les conversions nombreuses que Saint Martin y avoit faites par ses Missionnaires, et qui lui avoient merité le surnom glorieux d’Apôtre des Gaules, titre sous lequel il nous arrivera souvent de le désigner. C’est ce qui paroît & par l’Histoire et par la loi que publia vers le milieu du sixiéme siecle le roi Childebert, fils de Clovis, pour extirper les racines de l’idolâtrie. Nous la rapporterons en son lieu. Il est vrai que Theodose Le Grand avoit presqu’aboli le Paganisme en orient, même avant la fin du quatriéme siécle ; mais ce Prince n’avoit pas regné paisiblement dans les Gaules durant un tems assez long, pour y détruire entierement le culte des Idoles. Son fils Honorius qu’il avoit laissé Empereur d’Occident, tâcha bien d’y abolir le Paganisme en publiant plusieurs Loix qui tendoient à la destruction de cette religion ; mais les troubles et les guerres qui ne discontinuerent presque pas sous son regne, rendirent