Page:Dubos - Histoire critique de l'établissement de la monarchie françoise dans les Gaules, Tome II, 1742.djvu/140

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roit presenté pour cet effet, seroit nommé consul d’Occident par l’empereur qui le feroit inscrire dans les Fastes[1]. Cassiodore de qui je tire cette particularité, nous a même conservé la formule du diplome ou du brevet que Theodoric faisoit expédier à celui qu’il presentoit pour être nommé consul, et une dépêche particuliere que ce prince écrivit à l’empereur d’Orient, pour lui donner avis qu’il venoit de désigner Felix pour être nommé consul en l’année cinq cens onze. Dès qu’Anastase laissoit ainsi à Théodoric le droit de disposer réellement de la premiere des dignités de l’empire d’Occident, on peut bien croire aussi qu’il abandonnoit à ce roi barbare l’administration de la portion du partage d’Occident désignée ci-dessus, non point comme à un lieutenant ou bien à un representant révocable et comptable de sa gestion, mais comme à un souverain, comme à un collegue.

Quant à la seconde de celles des conditions du traité entre Anastase et Theodoric, qu’il nous est permis de sçavoir, elle étoit, qu’aucun Ostrogot ne pourroit être pourvû des magistratures et des autres emplois civils dans les provinces gouvernées par Theodoric, mais que ces emplois seroient tous exercés par des citoyens Romains. Voici où je prends ce fait-là. Procope nous a conservé une harangue faite à Bélisaire au nom des Ostrogots dans le tems que ce capitaine commandoit en Italie l’armée de Justinien, laquelle y faisoit la guerre contre cette nation, environ quarante ans après la paix concluë entre Anastase et Theodoric. Les ambassadeurs des Ostrogots après y avoir dit plusieurs choses concernant la modération avec laquelle ils avoient toujours vêcu en Italie, ajoutent. » Les Romains ont exercé seuls tous les Emplois civils, & jamais aucun de ces Emplois n’a été conferé à un Ostrogot. N’a-ce point été un Romain qui a toujours été déclaré Consul d’Occident chaque année par l’Empereur d’Orient ? » Or il n’est pas vraisemblable que Theodoric qui avoit tant de gens à récompenser, et qui devoit se fier à ses compatriotes plus qu’aux Romains, en eût usé avec tant d’égards pour ces derniers, s’il n’eût point été obligé par quelque convention à garder des ménagemens qui lui étoient à charge. Il est donc apparent que lorsqu’Anastase lui avoit abandonné l’administration civile et militaire de la

  1. Cass. Var. lib. 2. Ep. 3. lib. 9. Ep. 22. Ibid. libr. 6. Formul. prima lib. 2. Ep. 1.