Page:Dubos - Histoire critique de l'établissement de la monarchie françoise dans les Gaules, Tome II, 1742.djvu/163

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les armes pour tirer raison du manquement de parole de Gondebaud. Il souffre tranquillement cette injure, et autant qu’on en peut juger par son caractere qui nous est assez connu, uniquement par l’impossibilité d’en tirer raison. Quel tort ne devoit pas faire à sa réputation l’impunité de Gondebaud ? Il y a plus : il semble que ces deux princes soient devenus amis bientôt après. Ce qui est de certain, c’est que comme nous le verrons, ils étoient ligués ensemble contre les Visigots en l’année cinq cens sept, c’est-à-dire six ans après les évenemens dont il s’agit ici. Deux pareilles révolutions ne sçauroient être arrivées en Bourgogne dans le cours d’une année ; comme Marius Aventicensis dit positivement qu’elles arriverent, sans qu’il fût arrivé de grandes révolutions dans les esprits des sujets de Gondebaud. Il faut que la premiere de ces révolutions ait été l’effet de l’envie qu’avoient alors les romains de son royaume de changer de maître, et que la seconde révolution ait été l’effet du changement subit de ces mêmes romains dont Gondebaud avoit regagné pour lors l’inclination, en donnant des assurances positives de faire incessamment tout ce qu’ils pouvoient souhaiter de lui, et de remédier incontinent à tous les désordres qui lui avoient attiré leur aversion.

Quoique nous n’ayons l’histoire du cinquiéme siecle que très-imparfaitement, elle ne laisse pas néanmoins de fournir plusieurs faits très-propres à bien appuyer les conjectures que nous faisons pour expliquer les causes des malheurs surprenans et des succès inesperés de Gondebaud durant le cours de l’année cinq cens.

Deux choses donnoient envie aux Romains, sujets du roi Gondebaud, de changer de maître. La premiere, étoit la religion de ce prince qui faisoit profession publique de l’arianisme. La seconde, le mauvais traitement que les Bourguignons faisoient aux Romains dont ils étoient les hôtes. Or nous allons raporter deux faits qui font ajouter foi à ces deux motifs. Le premier fera voir que quelques mois avant la bataille de Dijon, ce prince avoit ôté à ses sujets catholiques l’esperance de sa conversion, qui jusques-là, pour user de la phrase vulgaire, leur avoit fait prendre patience, et les avoit retenus sous l’obéissance d’un prince hérétique. Nous ferons voir aussi que lorsque Gondebaud fut rétabli, il donnoit, corrigé qu’il avoit été par ses disgraces, toute l’esperance d’une conversion très-prochaine. Le second fait que nous rapporterons, c’est que Gondebaud dès qu’il fût rentré en possession de ses Etats, publia un nouveau