Page:Dubos - Histoire critique de l'établissement de la monarchie françoise dans les Gaules, Tome II, 1742.djvu/215

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une machine d’une autre espece. Cette machine jettoit sur nos bâtimens un grapin qui tenoit à une bonne chaîne de fer attachée au bout d’une grosse poutre, à l’autre bout de laquelle étoit aussi attachée une masse de plomb, dont le poids étoit très-lourd. Dès que le grapin avoit bien mordu, on laissoit aller le contrepoids. Alors le levier enlevoit le bâtiment accroché, & lorsqu’il étoit comme suspendu en l’air, on le laissoit retomber tout d’un coup, & s’il ne couloit point à fond, du moins prenoit-il beaucoup d’eau. » Voila suivant l’apparence, quelles étoient les machines avec lesquelles les Romains et les Gots qui défendoient Arles, prétendoient submerger les bateaux, les ponts volans, et les autres bâtimens legers dont les Francs s’étoient servis pour passer le Rhône, et qu’ils avoient ensuite employés à la construction de leur pont. On peut bien croire que les officiers Romains n’avoient pas manqué après la prise de Syracuse, de bien examiner les machines qu’ils avoient vû faire des effets si prodigieux durant le siege. Ils les auront même dessinées, et l’art de les construire aura passé d’ingenieur en ingénieur, jusqu’à ceux qui servoient dans les armées de Théodoric roi d’Italie. Je trouve dans Tacite un fait très-propre à rendre encore plus probable la conjecture que je viens de hazarder, et il se rencontre dans un endroit de son histoire où cet écrivain raconte des évenemens arrivés de son tems. Notre auteur dit donc, que durant la guerre que Civilis et les Germains firent contre l’empereur Vitellius, ces barbares attaquerent un des camps fortifiés que les Romains avoient sur les bords du Rhin. Les troupes Romaines mirent en usage avec succès toutes leurs machines de guerre pour se défendre ; mais dit Tacite, celle qui faisoit le plus d’effet et qui épouvantoit davantage l’ennemi, étoit une espece de grue, laquelle jettoit sur lui des grapins qui acrochoient un homme et souvent plusieurs à la fois. On la retournoit ensuite de maniere qu’elle laissoit tomber dans le camp les hommes qu’elle avoit ainsi enlevés. Revenons devant Arles.

Après que les assiegeans eurent passé le Rhône, et tandis qu’ils campoient déja devant les murailles d’Arles, il arriva un incident qui tira son évêque d’affaire, et qui le fit mettre en pleine liberté. On découvrit que les juifs, ceux de ses ennemis qui