Page:Dubos - Histoire critique de l'établissement de la monarchie françoise dans les Gaules, Tome II, 1742.djvu/275

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Francs s’y étoient établis en plus grand nombre que dans toutes les autres contrées des Gaules.

Il n’y avoit pas d’autre moyen que celui-là pour répartir également les Francs entre les fils de Clovis, et pour donner à chacun d’eux le même nombre de combattans de cette nation-là. Les Francs ne composoient pas plusieurs corps de troupes reglées, dont les soldats et les officiers fussent toujours au drapeau. Ils ne s’assembloient que lorsqu’il étoit question de marcher en campagne, et le reste du tems ils demeuroient dans leurs domiciles ordinaires. Ainsi l’on ne pouvoit partager également cette espece de milice, qu’en partageant les pays où ceux qui la composoient se trouverent domiciliés, et cela en faisant cette division par rapport au nombre des Francs domiciliés en chaque pays. Qu’aura-t’il résulté de ce partage des cités où les Francs étoient habitués, lorsqu’il eut été fait uniquement avec égard au nombre des Francs qui se trouvoient dans chaque cité ? C’est que les quatre lots se seront trouvés fort inégaux par raport à l’étendue du territoire, et par raport au revenu. Il aura donc fallu pour compenser cette inégalité, attribuer, quand on en sera venu à la division des cités où géneralement parlant il n’y avoit point de Francs domiciliés, un plus grand nombre de ces dernieres cités au partage qui avoit eu moins de cités que les autres, lorsqu’on avoit divisé d’abord les cités par raport au peuple, par raport aux quartiers des Francs qui s’y pouvoient trouver.

Voilà probablement ce qu’a voulu dire Agathias, lorsqu’il a écrit qu’après la mort de Clovis ses enfans partagerent son royaume entr’eux par rapport aux nations et par rapport aux cités. Ce que nous trouvons concernant ce partage, soit dans Grégoire de Tours, soit dans les autres écrivains qui ont vêcu dans les Gaules, confirme encore l’idée que nous venons d’en donner. En effet on y voit que le partage dont il s’agit, fut fait d’une maniere très-singuliere, et qui marque sensiblement qu’en le reglant, on avoit eu en vûe quelque dessein particulier. Entrons en preuve.

Dès qu’il s’agissoit de partager en quatre lots égaux le royaume de Clovis, le bon sens et la raison d’état vouloient qu’on composât chaque lot des cités contigues, afin de faire de chaque lot un corps d’Etat arrondi et dont tous les membres fussent unis et tinssent ensemble. Cependant voilà ce qui ne se fit point. Au contraire, et c’est ce qui paroît extrêmement bizarre, quand on ne fait point de reflexion au motif qui, suivant mon opinion, détermina les compartageans à prendre le parti qu’ils