Page:Dubos - Histoire critique de l'établissement de la monarchie françoise dans les Gaules, Tome II, 1742.djvu/294

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une riviere qui traverse le canton de l’Allemagne, qui s’apelle encore aujourd’hui le Land-Graviat de Turinge ; et laquelle se jette dans la Sale, dont l’Elbe reçoit les eaux. Les Turingiens se rallierent bien sur les bords de l’Unstrut, mais ils y furent défaits une seconde fois par les Francs qui les avoient suivis. Il arriva même qu’il se noya un si grand nombre des vaincus dans l’Unstrut qu’ils vouloient traverser pour se sauver, que leurs corps servirent de pont aux Francs pour la passer. Après une victoire si complette, ils soumirent tout le royaume des Turingiens.

Clotaire ramena avec lui Radegonde fille de Berthier, et même il épousa cette princesse. Mais Clotaire ayant fait tuer à quelque tems de-là le frere de cette reine, elle se sépara d’avec lui, et se consacra au service de Dieu en prenant l’habit de religieuse dans le monastere de Sainte Croix de Poitiers qu’elle avoit fait bâtir, et où elle mourut en odeur de sainteté.

Tandis que les deux rois Francs étoient encore dans le pays des Turingiens, continue Gregoire de Tours, Thierri voulut se défaire de son frere. Les embuches qu’il lui dressa furent découvertes, et ne réussirent point. Mais Hermanfroy tomba dans le piege que le roi Thierri lui avoit tendu. Le roi des Turingiens s’étoit sauvé de la déroute de l’Unstrut, et Thierri qui craignoit toujours ce prince, lui fit proposer une entrevûë, pour laquelle il lui envoya même un sauf-conduit en bonne forme. Hermanfroy qui se flatoit d’obtenir quelque chose de Thierri, vint le trouver, et il en fut reçû avec bonté. On lui fit même de riches presens. » Il arriva cependant, un jour que ces deux Princes s’entretenoient ensemble, en se promenant sur les remparts de la Ville de Tolbiac, qu’un inconnu poussa si rudement Hermanfroy, qu’il le fit tomber du haut en bas, & que ce Prince mourut de sa chute dans l’instant. Je ne sçais point, ajoute à ce récit Gregoire de Tours, le nom de celui qui le poussa, mais bien des gens accuserent Thierri d’avoir fait faire le coup. »

Je le croirois d’autant plus volontiers, qu’il semble en lisant notre histoire, que Clovis eût transmis à chacun de ses fils l’envie d’être le seul maître des Gaules, et sa jalousie contre les autres princes ses plus proches parens. Nous venons de voir