Page:Dubos - Histoire critique de l'établissement de la monarchie françoise dans les Gaules, Tome II, 1742.djvu/316

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

est pas permis de les laisser croître plus longs. Les Bourguignons après avoir mis la tête de Clodomire au haut d’une lance, la firent voir à ses Troupes, qui furent tellement consternées par la mort de leur Chef, qu’elles ne voulurent plus s’exposer. Enfin leur découragement fut si grand, qu’il donna moyen aux Bourguignons de sortir d’embarras, en terminant la guerre par une paix avantageuse, & dont les conditions furent à-peu-près les mêmes que celles qu’ils jugerent à propos de proposer. Dès qu’elle eut été conclue, les Francs évacuerent le Pays tenu par les Bourguignons. »

Suivant la Chronique de l’évêque d’Avanches la bataille de Véséronce où Clodomire fut tué, se donna la même année que Godemar avoit été proclamé roi, c’est-à-dire, en cinq cens vingt-quatre.

Il est facile de concilier l’opposition qui paroît d’abord entre le récit de Gregoire de Tours et celui d’Agathias ; quand le premier dit, que la mort de Clodomire n’empêcha point les Francs de gagner la bataille de Véséronce, et quand le second écrit que cette mort les découragea tellement, qu’ils ne voulurent plus s’exposer. Grégoire de Tours a entendu parler seulement de l’action de guerre, qui étoit engagée déja lorsque Clodomire fut tué ; et l’auteur grec entend parler en général des évenemens qui arriverent après la bataille de Véséronce. La mort de Clodomire aura fait dans son armée le même effet que fit la mort de Gaston De Foix dans la sienne. La mort de Gaston n’empêcha point son armée d’achever de gagner la bataille[1], et de prendre la ville de Ravenne ; mais elle y éteignit si bien l’audace et l’esperance, que cette armée devint bientôt semblable à une armée vaincue. La mort de son général la découragea de maniere, qu’elle ne songea plus qu’à repasser les monts.

Ce que disent nos deux historiens, le latin sur le rétablissement de Godemar, et le grec sur la paix faite entre les Francs et les Bourguignons, n’a pas besoin d’aucune conciliation pour s’accorder. Godemar profitant du découragement où les Francs étoient tombés après la mort de Clodomire, aura recouvré ses Etats, et les Francs, qui n’esperoient plus de l’en dépouiller, auront fait la paix avec lui. Il y a véritablement dans Agathias une chose que je n’entreprendrai point d’accorder

  1. Donnée en 1512.