Page:Dubos - Histoire critique de l'établissement de la monarchie françoise dans les Gaules, Tome II, 1742.djvu/485

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mais comme nous l’avons vû aussi, c’étoit un corps de troupes nouvellement levé dans la Grande Bretagne pour le service de l’empire. On a même expliqué que ce corps étoit composé d’habitans de la Grande Bretagne, et non point d’habitans des Gaules. Gregoire de Tours ne commence à faire mention des Bretons comme d’un peuple, pour ainsi dire, domicilié dans les Gaules, que lorsqu’il en est venu à l’histoire des successeurs de Clovis, sous lesquels ils s’étendirent.

Ainsi nos Bretons n’ayant cherché un azile dans la Troisiéme Lyonoise qu’après qu’elle eut passé sous la domination de ce prince ; ils n’y auront été reçûs qu’à condition de se soumettre à son autorité. Quand même il seroit vraisemblable, ce qui n’est pas, que leur colonie y eût été fondée avant la réduction des Armoriques à l’obéissance de Clovis, on devroit supposer que cette colonie auroit eu la même destinée que les anciens habitans du territoire où elle auroit été reçue, et avec lesquels elle auroit été incorporée. Il n’y a aucune preuve du contraire de tout ce que je viens de dire, et il est contre toute apparence qu’une poignée de fugitifs eût fait tête à un prince aussi puissant que l’étoit alors Clovis, du moins, sans que l’histoire eût fait quelque mention de cette résistance. Sur ce point-là, je me refere aux doctes écrits publiés en differens tems, pour montrer que toute la petite Bretagne a toujours reconnu les rois des Francs pour ses seigneurs. On trouvera dans ces écrits une solide réfutation de la preuve la plus plausible qu’alléguent les auteurs qui ont soutenu le sentiment opposé, laquelle est tirée de ce qu’un évêque Breton a souscrit les actes du concile tenu à Tours en l’année quatre cens soixante et un[1].

Quelle est la loi suivant laquelle auront vêcu les Bretons Insulaires établis dans les Gaules ? Ils auront ainsi que les Romains de leur voisinage, vêcu selon le droit Romain, jusques à ce que les révolutions dont nous parlerons un jour, y ayent substitué les coutumes. On vient de lire que les Saxons Bessins, pour se déguiser en Bretons, s’étoient coupé les cheveux très-court, et qu’ils avoient pris des habits differens de ceux que les peuples Germaniques dont ils étoient un, portoient ordinairement. Or comme il n’y avoit alors que les Romains qui portassent des cheveux courts, il paroît que nos Saxons pour se travestir en Bretons, s’étoient travestis en Romains, et par consequent que nos Bretons Insulaires étoient encore vêtus à la Romaine. Voilà de quoi fortifier notre conjecture sur la loi suivant laquelle les

  1. Hist. Crit. de l’Etabl. des Bretons dans les Gaules, Tom. 1. pag. 51.