Page:Dubos - Histoire critique de l'établissement de la monarchie françoise dans les Gaules, Tome II, 1742.djvu/605

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ceux qui les vouloient obtenir, à se soumettre aux volontés du prince ! D’ailleurs, géneralement parlant, les Francs et les autres Barbares répandus dans les Gaules, devoient être dans chaque cité en plus petit nombre que les Romains, qui étoient armés aussi-bien que ces Barbares, et qui avoient interêt que tout habitant du royaume fût aussi soumis qu’eux à une autorité à laquelle ils obéissoient en tout. La condition du Romain auroit été par trop dure, s’il eût vécu avec des voisins qui n’eussent point été tenus d’obéir aussi promptement que lui aux volontés du souverain. Il seroit inutile d’expliquer plus au long combien la portion du peuple sur laquelle un prince regne despotiquement, a interêt que le prince ait sur tous ses autres sujets la même autorité qu’il a sur elle. Cet interêt est sensible. Les Francs épars dans les Gaules, et qui n’étoient plus rassemblés dans un petit canton, comme ils l’étoient lorsqu’ils habitoient encore la Germanie, auront donc été obligés d’obéir au souverain avec autant de soumission que les Romains au milieu desquels ils vivoient.

Une chose aura encore contribué beaucoup à faciliter aux successeurs de Clovis l’entreprise de se faire obéir exactement par les Francs. C’étoit l’usage établi dès le tems qu’ils habitoient encore dans la Germanie, et suivant lequel le roi jugeoit seul et sans assesseurs en matiere civile et en matiere criminelle, comme on voit que Clovis jugea, quand il punit le Franc, qui avoit donné un coup de sa hache d’armes sur le vase d’argent que saint Remi réclamoit. Qui peut empêcher un prince d’augmenter son autorité sur une partie de ses sujets, quand il est seul leur juge, et quand ils attendent leur fortune de ses bienfaits, sur-tout dans les commencemens d’une nouvelle monarchie, et lorsque ces sujets tirés de leur ancienne patrie, se trouvent être transplantés au milieu d’autres sujets accoutumés depuis long-tems à une entiere soumission.

Dans le raisonnement que je viens de faire, j’ai bien voulu supposer conformément à l’opinion ordinaire, que l’autorité que tous les rois des Germains avoient sur leurs sujets, fût un pouvoir très-limité. On pourroit cependant soutenir le contraire sans témerité. Voici, par exemple, ce que dit Velleius Paterculus en parlant de Maraboduus un des rois des germains du tems de l’empereur Auguste. Maraboduus avoit des gardes