Page:Dubos - Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture, Tome 2,1733.djvu/32

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borné, et qui rend un homme plus méprisable aux yeux des philosophes, que ne l’est aux yeux des courtisans, le laquais chargé de la livrée d’un ministre disgracié. Je parle de cette hauteur qui consiste dans la noblesse des sentimens du cœur, et dans une élevation d’esprit, et qui fait mettre un juste prix aux avancemens où l’on peut aspirer, comme à la peine qu’il faut prendre pour y parvenir, sur tout quand il est question de les solliciter auprès de personnes qu’on ne croit pas être des juges compétens du mérite. Enfin les vertus rendent bien capable des grandes places, mais il arrive souvent dans tous les siecles qu’on n’y puisse parvenir que par des bassesses et par des vices. Il doit donc arriver que plusieurs génies, nez propres aux grands emplois, meurent sans avoir manifesté leurs talens. On n’a pas voulu leur confier le commandement des armées, ni des provinces à conduire. On n’a pas voulu donner à celui qui étoit né avec le génie de l’architecture, la conduite d’un bâtiment où son talent pût se déploïer. Mais les hommes nez pour être de grands peintres ou de grands poëtes,