Page:Dubos - Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture, Tome 2,1733.djvu/37

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propose pour être l’objet de son application, ne sçauroit le fixer, si cet objet n’est pas celui que la nature veut qu’il suive. Il ne s’en laisse jamais écarter pour long-temps, et il y révient toûjours malgré les autres, et quelquefois malgré lui-même. De toutes les impulsions, celle de la nature, dont il tient son penchant, est la plus forte. Tout devient palettes et pinceaux entre les mains d’un enfant doüé du génie de la peinture. Il se fait connoître aux autres pour ce qu’il est, quand lui-même il ne le sçait pas encore. Les analistes de la peinture rapportent une infinité de faits qui confirment ce que j’avance. La plûpart des grands peintres ne sont pas nez dans les atteliers. Très-peu sont des fils de peintre, qui, suivant l’usage ordinaire, auroient été élevez dans la profession de leurs peres. Parmi les artisans illustres qui font tant d’honneur aux deux derniers siecles, le seul Raphaël, autant qu’il m’en souvient, fut le fils d’un peintre. Le pere du Georgeon et celui du Titien, ne manierent jamais ni pinceaux ni cizeaux,