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JOURNAL

Derwent. À cinq heures nous vîmes un bâtiment Anglais venant de Londres et dont le Capitaine et le Second était morts durant la traversée. Le cuisinier avait été soupçonné de les avoir empoisonnés ; et avait eu son procès à Hobart-Town où ils avaient relâché. Un bosseman avait été contraint de prendre le commandement du vaisseau qui était chargé d’émigrés pour la Nouvelle-Galles.

Le 25 au matin nous vîmes encore la Côte qui nous parut être bordée de hautes montagnes. Mais nous ne la vîmes pas longtemps : le temps s’obscurcit et il tomba comme une brûme épaisse qui empêchait de voir. L’équipage craignait même pour le vaisseau. Car nous étions près de terre, nous pouvions rencontrer quelques écueils ; ils gagnèrent le large. Vers dix heures le tems s’éclaircit et nous découvrîmes de nouveau la terre. La côte nous parut encore très escarpée ; et la mer venant s’y briser, l’eau rejaillissait à plus de cinquante pieds en l’air. Vers midi nous apperçûmes un Phare sur un point dominant du rivage — en même temps il vint un pilote à bord, et nous entrâmes heureusement dans le Port Jackson et allâmes mouiller devant Sydney. Ainsi nous arrivâmes tous sains et saufs à notre lieu d’exil après une traversée de cinq mois. Il est étonnant de voir qu’un aussi long et dangereux voyage se soit fait sans accident, ni même sans que nous ayons éprouvé de mauvais temps qui auraient pu nous mettre en danger. L’équipage lui-même ne put s’empêcher d’exprimer son étonnement. — Bien que