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JOURNAL

passâmes aujourd’hui sous le soleil qui alors se trouvait entre les 5° 6′ dégrés de latitude Sud, de longitude de Westminster. À une distance à l’Est, nous distinguâmes un navire. Le 8, même vent, ciel serein. Nous rencontrâmes un brick anglais, venant de Jersey et faisant voile pour l’Amérique du Sud. Nous en vîmes un autre à une grande distance cinglant encore pour le même lieu. Le temps était chaud. Heureusement pour nous la brise Sud Est nous rafraichissait, latitude (Sud) 30°.

Le 9, même vent, chaleur brûlante, ciel nuageux. Nous vîmes des légions de poissons volants et un grand nombre de poursils, les matelots, essayèrent à prendre un de ces derniers. Ils réussirent en effet à le darder ; mais au moment où ils allaient le tirer de l’eau, le harpon s’arracha, et le poursil tout blessé qu’il était, s’enfuit rougissant l’eau de son sang.

Le 10 Octobre dans l’après-midi, nous passâmes l’Équateur par un beau temps, et un peu rafraichis par une faible brise. Nous nous trouvâmes donc dans l’Hémisphère Septentrional, le nôtre par conséquent que nous avions laissé depuis cinq ans. Les matelots signalent ce jour par une fête burlesque. Ils se barbouillent de noir les uns les autres ; ensuite se lancent de l’eau avec des seaux pour se laver, disent ils. Ils se revêtirent ensuite d’habits comiques et firent des farces, chantèrent, etc. Mais toute cette bouffonnerie tendait plutôt à obtenir du Grogue de la part du Capitaine, que par respect pour Neptune. C’est une pratique à bord de tous les