Page:Duchaussois - Aux glaces polaires, Indiens et Esquimaux, 1921.djvu/126

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

et habiller, lui-même, sa femme et ses enfants, tout le temps que dure son ouvrage. Il ignore, d’autre part, le devoir qui incombe à tous les chrétiens de soutenir les ministres de l’Autel.

Est-ce inintelligence sauvage ? Non. Il se trouve en Colombie Britannique trois grandes familles de la même nation dénée, que Mgr Durieu, « ce missionnaire, des missionnaires », est parvenu à instruire de leur devoir, et qui donnent de bonne grâce, aussi généreusement que nos meilleurs fidèles de race blanche. Les Dénés qui fréquentent l’Île à la Crosse, mission voisine de l’Athabaska-Mackenzie, sont pareillement dévoués au soutien de leurs pasteurs.

Les fondateurs des missions de l’Extrême-Nord ne jugèrent pas opportun de prêcher à leurs néophytes la doctrine du support du prêtre.[1]

La manie de mendier, que trouvèrent d’ailleurs les missionnaires parmi les sauvages, ne suffisait-elle pas à les décourager dans l’entreprise de faire appel à leur libéralité ? Certaines tribus triomphent dans ce métier de quêteurs :

« Un Montagnais peut vous demander jusqu’à votre

  1. On a donné de cette attitude des missionnaires les explications suivantes :

    1. — La Compagnie de la Baie d’Hudson, au temps de son monopole, exigeait qu’on lui remît toutes les fourrures ; et le sauvage n’avait plus rien alors qu’il pût donner pour sa dîme. À l’expiration du monopole, la Compagnie continua sa pression par la menace, à peine tacite, d’abandonner les transports, si la mission acceptait les offrandes de ses paroissiens.

    2. — Un autre système, qui se jugera de lui-même, attachait ces pauvres simples à la Compagnie, au détriment du missionnaire : l’effacement des dettes. Le commis-traiteur vendait sa marchandise à crédit et payait quand même toutes les pelleteries du naïf débiteur, à un taux qu’il était facile de mettre en harmonie avec la créance, quitte à lui déclarer, au bout de quelques années, que ses dettes étaient libéralement effacées du grand livre ». Le brave homme, se croyant l’objet d’une largesse, allait trouver le missionnaire, dont il avait eu soin d’emprunter aussi, le plus possible, et lui tenait ce langage :

    « Quand donc effaceras-tu mes dettes ? La Compagnie le fait bien ! Elle est donc plus généreuse que toi ! » Que pouvait répondre le pauvre Père, tenu de « ménager » en même temps ses modiques ressources et la Compagnie ?

    3. — Un écueil, non moins redoutable, était dressé par le protes-