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AUX GLACES POLAIRES

Ce que je voudrais avant tout faire crier à son de trompe, c’est que je vous aime tous d’une tendresse maternelle. Cette affection, entée sur le Cœur de Jésus, foyer ardent et source intarissable de l’éternelle charité, centuple mes forces. L’homme naturel me crie : « C’est assez, dépose ton fardeau ! » Et le surnaturel : « La mesure de l’amour c’est d’aimer sans mesure et de se donner sans limites ! » En avant donc, tant qu’il plaira à Dieu ![1].


Il possédait excellemment la qualité des supérieurs dans lesquels doit se réfugier l’amour jaloux des mères. Il savait reprendre ses enfants, dans le tête-à-tête, s’il en était besoin ; mais devant l’étranger il les défendait de toute son âme : du coup, ils étaient tous parfaits ; et nul ne s’avisait deux fois de trouver à redire, en sa présence, sur quiconque d’entre eux.

Il pratiquait aussi l’art, si utile à ceux qui commandent, de faire plaisir dans les petites choses. Il eut à demander, aux mauvaises années, des sacrifices surhumains, des privations très dures sur des articles nécessaires, qu’il ne pouvait acheter ; mais, dans l’envoi, ainsi tronqué, il glissait une petite friandise, très peu coûteuse, comme un sachet de sucre pour le thé des jours de fête, un cigare pour ceux qui fumaient, quelques gouttes de cognac pour ceux « du midi » ; et le destinataire fondait d’attendris-

  1. Jamais Mgr Faraud n’écrivit une lettre à ses missionnaires, n’eût-elle eu pour objet que des affaires sèchement matérielles, sans la relever de vues surnaturelles. Ainsi ces encouragements au Père Ducot, en lui envoyant l’état de son allocation : « … Quelque difficile que soit la position que vous occuperez, gravez fortement dans votre esprit que sans Dieu vous ne pouvez rien, et qu’avec Lui vous pouvez tout. Que la soif ardente des âmes, qui ont coûté si cher à notre très doux et très aimable Sauveur,’ne vous quitte point. Il pourra se faire, et même il se fera souvent, dans votre solitude, que la matière ouvrable que vous convoitez vous manquera, à l’extérieur : vous pourrez toujours trouver en vous-même le moyen de satisfaire votre désir du bien. Nous sommes les ouvriers des âmes : nous devons vouloir partout et toujours travailler à leur salut, à leur sanctification. Or, nous sommes toujours sûrs de nous trouver nous-mêmes. Comme Dieu se complaît souverainement dans une sainte âme, que, par conséquent, il considère plus, il tire plus de gloire d’une seule âme vraiment sainte que de mille indifférentes ou moins saintes. En vous sanctifiant de plus en plus, vous atteindrez mieux le but de votre vocation qu’en en convertissant un grand nombre d’autres… Allons, continuez, tout en vous sanctifiant, à faire l’impossible pour retirer les pauvres âmes des griffes de Satan. Vous faites un gravai ! trop ; pénible ; la récompense sera proportionnée. Bon courage !… »