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Page:Ducros - Les Encyclopédistes.djvu/102

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bien : personne ne sera pendu et la vérité sera dite… Eh ! oui, nous avons de mauvais articles de théologie ; mais avec des censeurs théologiens et un privilège, je vous défie de les faire meilleurs. » Sans doute, on confie à Voltaire des articles peu importants, presque rien que des articles littéraires ; mais quoi ! « N’est-ce pas vous qui nous envoyez de quoi nous faire lire ? » L’article idée, qu’il demande, est déjà donné ; mais on lui offre, en revanche, le mot imagination et « qui peut mieux s’en acquitter que lui ? il peut dire comme M. Guillaume : je le prouve par mon droit ». Toutes ces jolies choses, Diderot n’avait pas le temps ou l’idée de les dire et nous l’avons vu même qui négligeait de répondre à celui dont les princes et les rois s’honoraient d’être les très réguliers correspondants.

Aussi n’est-ce pas lui, mais bien d’Alembert, qui représente et incarne pour Voltaire l’Encyclopédie et quand, à Ferney, il parlera de celle-ci à Mme d’Épinay, il n’aura à la bouche que le nom de d’Alembert. D’Alembert, c’est l’Encyclopédiste selon son cœur, et c’est, de plus, un vrai sage, Socrate moins Alcibiade, un caractère antique enfin, tandis que, pour le génie, c’est un Pascal moins la superstition. À voir ainsi Voltaire, à qui sans doute, « les compliments ne coûtent rien », mais qui sait toujours ce qu’ils lui peuvent rapporter, à le voir, dis-je, encenser de la sorte d’Alembert, on devine qu’il doit avoir singulièrement besoin de lui. Et, en effet, d’Alembert n’est pas seulement son fondé de pouvoir auprès de Diderot et des Encyclopédistes, il est encore son pourvoyeur de nouvelles littéraires et autres : il le met « au fait des sottises courantes » : c’est lui qui lui apprend ce qu’on peut oser et ce qu’on doit taire selon que les philosophes ou les pédants à petit rabat ont le haut du pavé ; c’est lui qui lui souffle, suivant les occurrences, qui il convient de caresser ou à qui il peut se permettre « de donner des calottes ». Qu’il se méfie « d’une certaine dame qui n’aime pas les philosophes », c’est Mme de Pompadour qu’il veut dire, et même d’un autre de ses grands amis, de Choiseul qu’il a toujours,