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Page:Ducros - Les Encyclopédistes.djvu/114

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Celles-ci s’appliquèrent d’abord à traduire, puis à imiter ces maîtres incomparables que nous offrait l’antiquité et qu’on désespérait de pouvoir égaler jamais ; peu à peu cependant, et à leur exemple, on tâcha de penser d’après soi et dans sa propre langue et « l’imagination des modernes renaquit de celle des anciens. » La poésie, qui avait ouvert ses ailes avec Ronsard, régla son essor avec Malherbe, tandis que Balzac donnait à notre prose le nombre et la noblesse ; notre langue était prête pour les chefs-d’œuvre et le grand siècle naquit, siècle par excellence des belles-lettres, c’est-à-dire de l’imagination artistique, auquel a succédé le siècle de la raison et des sciences philosophiques. Les instituteurs de ce siècle de lumières, ceux qui ont préparé cet avènement de la philosophie, sont : en Angleterre, François Bacon ; en France, Descartes ; Bacon, le premier de ceux qui ont préparé dans le silence la lumière dont le monde devait être éclairé peu à peu, l’éloquent philosophe qui, après avoir fait le dénombrement de toutes les sciences, a osé dire aux hommes : « Voilà le peu que vous avez appris et voici tout ce qui vous reste à chercher, » le précurseur, par conséquent, et l’inspirateur direct de l’Encyclopédie ; et Descartes, cet audacieux esprit qui, en secouant le joug de la scolastique et de l’autorité, a, par son heureuse révolte, « rendu à la philosophie un service plus essentiel peut-être que tous ceux qu’elle doit à ses illustres successeurs ».

Aussi d’Alembert a-t-il raison de proclamer plus loin (et après avoir rendu hommage au génie de Newton et à la sagesse de Locke), que « l’Angleterre nous doit la connaissance de cette philosophie que nous avons reçue d’elle ». À cette heure, conclut-il, la France a ses savants (et il eût pu se nommer lui-même), et ses grands hommes de lettres ; et même, ce qui n’est pas un médiocre avantage, les premiers parlent la langue des seconds : ici, c’est une Histoire naturelle, pleine d’élévation et de noblesse ; là, c’est un Esprit des lois, « monument immortel des progrès de la raison dans ce siècle éclairé » ; et c’est, enfin, l’écrivain qui a