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noyer dans deux feuilles de verbiage ce qu’on devrait dire en deux lignes. La logique, qu’on apprend ensuite, avec ses universaux, ses catégories, ses figures, ressemble à celle du Bourgeois gentilhomme. On accorde aussi trop de temps aux pratiques du culte (voilà la laïcisation à ses timides débuts). Et d’Alembert se résume ainsi : « Il résulte de ce détail qu’un jeune homme, après avoir passé dans un collège dix années, en sort, lorsqu’il a le mieux employé son temps, avec la connaissance imparfaite (déjà au dix-neuvième siècle !) d’une langue morte. Nous ne faisons qu’exposer ici ce que pensent les maîtres les plus sensés, mais ce que personne d’entre eux n’ose écrire. Je crois qu’on devrait se borner à entendre Horace et Virgile, et que le temps qu’on emploie à composer en latin est un temps perdu. Il est plus difficile d’écrire et de bien parler sa langue que de parler et d’écrire une langue morte (les Voltaire de l’antiquité n’étant plus là pour se moquer de vous). Les langues étrangères sont bien plus utiles à savoir que les langues mortes. Je ne puis penser sans regret au temps que j’ai perdu dans mon enfance. » (Art. Collège[1].)

Enfin, sur certains domaines, l’Encyclopédie sait donner une formule si précise et si nette à ses revendications que de celles-ci va naître une science nouvelle ; nous voulons parler de l’Économie politique. En 1756 et 1757 parurent, dans l’Encyclopédie, deux articles remarquables. Fermiers et Grains ; ils étaient de la main de Quesnay et ils renfermaient déjà toutes les idées dominantes du système physiocratique. Sans entreprendre d’apprécier ici ce système, nous remarquerons, pour ce qui intéresse notre sujet, qu’il y eut deux choses distinctes dans la physiocratie naissante : d’une part, et comme on l’a très bien dit, « un ensemble de réclamations suscitées par les besoins du pays[2] »,

  1. Sur l’inoculation, Tronchin établit, par des statistiques, que si elle était « répandue, elle sauverait par an 25 000 Français ». Après avoir parlé des impôts sur le théâtre, l’auteur ajoute : « On accepte l’aumône des comédiens et on leur refuse des prières. »
  2. Espinas : Histoire des doctrines économiques, 227.