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Page:Ducros - Les Encyclopédistes.djvu/171

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mations de collège contre Sylla et Octave, ou encore, comme le disait crûment Grimm dans le fameux sermon philosophique qu’il prononça chez le baron d’Holbach en 1770, « c’est rabâcher sans cesse des termes de réclame », qui ne portaient d’ailleurs aucun préjudice aux tyrans et faisaient applaudir, sans les compromettre, leurs inoffensifs ennemis. En réalité, et leur sincère enthousiasme pour Frédéric et Catherine le prouve de reste, ils s’accommoderaient parfaitement d’un monarque absolu, pourvu qu’il fût ami des lumières, c’est-à-dire, de l’Encyclopédie, et adversaire, non-seulement des prêtres, qui sont des « imposteurs », mais même, si on voulait prendre à la lettre leurs propres déclarations, des philosophes qui ne sont pas de l’Encyclopédie. N’ont-ils pas trouvé étrange que « la farce de Palissot (les Philosophes) ait été jouée sous l’autorité du gouvernement, que la police ait permis de jouer cette atroce satire[1] » ? et Diderot ne dit-il pas d’une philosophie qu’il désapprouve (le Spinozisme) : « une doctrine si énorme ne doit pas être examinée dans l’école, mais punie par les magistrats[2] ? »

Les protestations des Encyclopédistes étaient donc, jusqu’à une certaine date, tout au moins, que nous préciserons, très légitimes, quand ils repoussaient l’accusation perfide qu’on lançait sans cesse contre eux d’être les ennemis de l’autorité établie. Dans son trop fameux discours à l’Académie, Pompignan dit que « cette philosophie altière frappe également le trône et l’autel » ; et Moreau, dans ses Cacouacs, affirme que l’esprit philosophique « tend à diminuer l’autorité du roi et de ses ministres. » Diderot ne soutient-il pas, au contraire, que « ce serait un vice dans un gouvernement qu’un pouvoir trop limité dans un souverain[3] ? » Et à propos des Parlements, ce même Diderot écrit, et cela dans un opuscule qui, n’étant pas destiné à être publié, contient bien sa véritable pensée : « Je pense qu’il ne faut

  1. Grimm, IV, 241.
  2. Encycl. : art. Liberté.
  3. Encycl. : art. Société.