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Page:Ducros - Les Encyclopédistes.djvu/313

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Et de ces principes commodes les théologiens déduisaient, avec une impitoyable logique, les conséquences que voici. On leur disait : ces hommes, que vous voulez proscrire, ils vivent pourtant dans la même société que vous ; vous avez donc besoin d’eux, comme ils ont besoin de vous ; quelle sorte de commerce y aura-t-il donc désormais entre eux et vous ? « Le même, répondaient-ils, qu’entre des chrétiens fidèles aux préceptes de l’Évangile et d’autres dont les mœurs sont scandaleusement déréglées[1]. » Et ce n’est pas, d’ailleurs, la faute de l’Église si les magistrats permettaient encore qu’on fût à la fois protestant et Français, car toutes les assemblées du Clergé n’avaient cessé de demander, l’une après l’autre, « qu’on rendît aux lois toute leur rigueur et à la religion tout son éclat[2]. » Ces lois bienfaisantes, elles existent, en effet, et il n’y a qu’à exiger des magistrats qu’ils les appliquent plus sérieusement, et les heureux effets ne s’en feront pas longtemps attendre, écoutez plutôt : « Louis XV, devenu majeur, donna son excellente déclaration de 1724, par laquelle tout acte contraire à la religion catholique était puni des galères perpétuelles pour les hommes et de la prison perpétuelle pour les femmes, avec la confiscation des biens. C’est là le chef-d’œuvre de la politique chrétienne et humaine. Si les magistrats ne se fussent pas relâchés, il n’y aurait ni mariages (calvinistes), ni bâtards à légitimer ; on aurait chassé sans effort les ministres et l’hérésie aurait pris fin[3]. » Or, voici cette « excellente » Déclaration du 14 mai 1724 : Défense était faite, sous peine des galères… de professer aucune autre religion que la catholique. Ordre était donné de livrer et de mettre à mort les prédicants. Ordre, sous peine d’amende ou de plus grandes peines, de faire baptiser, dans les vingt-quatre heures, les enfants par les curés. Ordre d’envoyer les enfants au catéchisme jusqu’à qua-

  1. Instruction pastorale de l’évêque du Puy (1763).
  2. Assemblée de 1765.
  3. Caveyrac : Apologie de Louis XIV et de son Conseil sur la Révolution de l’édit de Nantes, 1758, p. 448.