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Page:Ducros - Les Encyclopédistes.djvu/61

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La Faculté de théologie, le Parlement, l’archevêque de Paris, condamnèrent à l’envi l’infortuné abbé dont le plus grand péché était d’avoir collaboré à l’Encyclopédie. La Sorbonne, après avoir approuvé à l’unanimité, le 18 novembre, les propositions de l’abbé de Prades, déclara, le 30 décembre et suivant la formule consacrée, qu’elle en avait horreur (horruit sacra Facultas). C’est Diderot qu’on visait par-dessus la tête de l’abbé ; c’est Diderot qui, sans se nommer, répondit aux attaques des théologiens. Les Jansénistes, qui « voulaient ravir aux Jésuites l’honneur de haïr davantage les matérialistes, s’étaient montrés encore plus furieux pour rattraper les faveurs de la cour[1] ».

L’un d’eux, évêque d’Auxerre, Mgr de Caylus, ayant défendu, dans une lettre pastorale, « la sainteté de la religion méconnue » par l’abbé de Prades, Diderot répliqua par « l’Apologie de l’abbé de Prades[2] ».

Plusieurs des propositions que l’abbé soutenait dans sa thèse, avaient été censurées comme « pernicieuses à la société, contraires à l’intégrité et à l’autorité des livres de Moïse, injurieuses aux théologiens catholiques[3] ». Diderot

    connaissances de l’homme tirent leur origine des sensations, ainsi que les rameaux, du tronc d’un arbre fécond. » En outre, l’abbé avait reproduit son article : Certitude, écrit pour l’Encyclopédie. Enfin, une des propositions qui souleva le plus de colères était la suivante : « Les guérisons de Jésus-Christ, si on les sépare des prophéties, qui dévoilent à nos yeux leur divinité, n’ont point, pour nous persuader, la force des miracles, parce que quelques traits de ressemblance pourraient les faire confondre avec les guérisons d’Esculape. »

  1. D’Argenson, 3 février 1752.
  2. Il en écrivit la troisième partie ; les deux premières étaient de l’abbé Yvon. Diderot fait dire à l’abbé de Prades, dans l’Avertissement : « Cette troisième partie est autant la défense du discours préliminaire de l’Encyclopédie, d’où j’ai tiré ma première position (toutes nos idées viennent des sens), que la défense de ma thèse. » C’était reconnaître, ce que l’abbé avait hautement nié dans la première partie de l’Apologie, que la thèse incriminée était solidaire de l’Encyclopédie.
  3. M. Bouillier (Revue Bleue, 1882, II, 462) dit ; « Quelques parties de l’Apologie de l’abbé de Prades ont été attribuées, mais sans nulle preuve, à Diderot. » — Il n’y a pas de preuves, en effet ; il n’y a qu’une très forte présomption que les passages, cités dans notre texte, rappelant, non pas la manière de penser et d’écrire de l’abbé, mais le style