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tait à trouver de l’argent là où il n’y en a pas, et à n’en pas demander là où il y en a. La plupart de ces impôts ne tiennent aucun compte de la situation personnelle du contribuable ; le fisc ne s’occupe pas de savoir s’il a des dettes, s’il a des charges de familles, de vieux parents à entretenir. Sous prétexte que l’impôt doit frapper la chose, comme le dit M. Jules Roche, il frappe brutalement la personne qui possède la chose, sans s’occuper de savoir si le produit de cette chose et le produit du travail ne sont pas déjà insuffisants pour les nécessités les plus urgentes de la vie.

Si l’on étudie le système fiscal pratiqué dans les autres États de l’Europe, on est fort étonné de constater qu’il n’y a plus guère qu’en France et en Turquie où l’on s’effraye de l’impôt sur le revenu, de l’exemption de l’impôt sur le nécessaire, et de la progression de l’impôt sur le superflu, c’est-à-dire sur le revenu à mesure qu’il progresse lui-même. C’est encore en France que les impôts sur les objets de consommation sont le plus élevés ; que les frais de procédure atteignent, pour les petites fortunes, des chiffres tels qu’ils absorbent non seulement le revenu, mais souvent le capital entier. Depuis un siècle, chaque année les statistiques officielles constatent ces faits déplorables, les pétitions arrivent par milliers aux chambres ; c’est à peine si, après un siècle d’hésitation, on a enfin obtenu quelques réformes dont le résultat a tourné encore plutôt contre les victimes du système. On signale partout l’aggravation de la misère, la dépopulation des campagnes, la disparition du petit propriétaire, le chômage du travail dans les industries, la diffusion de plus en plus grande des doctrines antisociales parmi les nombreuses classes d’ouvriers et de prolétaires ; rien n’y fait. La ploutocratie, maîtresse de tous les rouages de la société, ne veut rien entendre ;