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Page:Dufour - Étude sur l’esthétique de Jules Laforgue, 1904.djvu/43

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une « exploration » de l’inconscient vers la conscience.

L’œil est en retard sur l’oreille. Tandis que celle-ci analyse les harmoniques, celui-là perçoit encore synthétiquement la lumière. Il n’accomplit donc pas sa fonction propre. Car les trois fibrilles de Young en font un prisme. Aussi, la physiologie justifie-t-elle les tentatives des « néo-impressionnistes », qui divisent le ton et en superposent les éléments — hachures ou « points », il n’importe — afin qu’à la distance voulue ces éléments se recomposent par une synthèse spontanée et que notre œil perçoive le ton même. Le peintre doit seulement éviter — devant certaines toiles de Signac l’on reconnaîtra que cette précaution n’est pas superflue — que le spectateur discerne encore les « points » composants à cette limite extrême du recul, passé laquelle les objets représentés cesseraient d’être distincts. Aussi bien une exécution imparfaite n’autorise-t-elle pas à condamner une méthode. Les « néo-impressionnistes » — la critique est, en vérité, bien imprudente — ont pour caution la science. Helmholtz, Chevreul et Charles Henry ne sont pas des garants méprisables.

Il serait juste de tenir compte au peintre « impressionniste » des conditions dans lesquelles il se met — de parti pris. Le « plein air » accroît la difficulté, ajoute des chances d’erreur. Car le paysage est mobile et mobiles sont aussi les impressions du peintre. — « Supposons qu’au lieu de peindre son paysage en plusieurs séances, il a le bon sens d’en établir la vie de tons en quinze minutes, c’est-à-dire qu’il est impressionniste. Il arrive là avec sa sensibilité d’optique propre. Cette