Page:Dufour - Vers les sommets, 1935.djvu/15

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
13
VERS LES SOMMETS

précédé avait comme engourdi les esprits et les corps, sous ce toit où commandait encore l’autorité patriarcale d’autrefois.

Mais voilà que le caquetage intime prend une autre tournure, une tournure qui sort de l’ordinaire. Françoise, l’aînée, « la grande demoiselle de la maison » comme on l’appelait en la taquinant volontiers, implore de la voix, du regard et du geste le silence, ce silence qu’elle obtenait toujours, parce qu’elle était quelqu’un de passablement volontaire. Elle s’adresse à son grand-père, vieux capitaine au long cours, en retraite depuis dix ans, que toute la paroisse de Saint-Loup-les-Bains tenait en très haute estime. Ce bon vieillard, encore alerte et sémillant, méritait bien cette grande considération, tant par la manière dont il avait honorablement rempli sa longue carrière que par les hautes qualités de civisme qui le distinguaient.

— Grand-père, commence-t-elle, pendant que nous sommes à bavarder, j’aimerais à vous consulter sur une chose qui me rend songeuse depuis quelque temps. Vous me direz votre opinion, n’est-ce pas ?

Dans ses yeux, une flamme s’allumait. Les regards se fixèrent sur elle. Puis, pour mieux se faire écouter de tous, de sa chère mère à qui