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VERS LES SOMMETS

La lutte fut rude et le vigoureux orateur qu’était LeBrun se montra superbe. Que de chevauchées périlleuses ! Que de veilles prolongées ! Que de sueurs versées ! Que de paroles dites ou criées ici et là ! Que de chocs terribles. Cette élection complémentaire avait pris les proportions d’une mêlée générale. Pour le battre à tout prix, les chefs avaient mobilisé une armée de « forts-en-gueule » qui, comme une meute enragée, couraient les maisons en aboyant.

Jules y connut toutes les espèces d’hommes, tous les héroïsmes, toutes les bassesses, les flatteries, le plus plat « chiencouchantisme » qu’on puisse imaginer. La veille de l’ « appel nominal », son cœur éprouvait du dégoût et sa voix s’en était allée. Il était temps que la campagne prît fin.

Il était fatigué. Il avait parlé dans des maisons particulières où tous les fumeurs d’un rang s’entassent et battent des mains. Il avait parlé dans des salles bondées d’un monde houleux et tapageur, à la porte des églises, à des foules frondeuses qui comptent des adversaires agressifs et turbulents. Il avait parlé dans le grand vent, sous la pluie, dans des milieux de désordres incontrôlables. Il avait parlé à côté d’orateurs qui le calomniaient, le vilipendaient, prédisaient sa défaite !